Il faudra peut-être plus que le simple sens du devoir civique pour inciter les jeunes à se rendre aux urnes lors des prochaines élections fédérales. Selon Élections Canada, 47 % des électeurs âgés de 18 à 24 ans ont voté lors des élections de 2021, soit une baisse de sept points de pourcentage par rapport au taux de participation de 54 % enregistré en 2019. Mais tout le monde ne s’attend pas à une nouvelle baisse de la participation des jeunes le 28 avril. Certains experts de l’engagement des jeunes et de l’état de la démocratie prévoient une augmentation du nombre de jeunes électeurs par rapport aux élections précédentes. Cependant, certains affirment que les jeunes sont désabusés par la politique partisane et que les partis devraient tenir compte des préoccupations de cette génération afin de la mobiliser. Amanda Munday, directrice générale de New Majority, un groupe de défense des droits qui œuvre à accroître la participation électorale des jeunes à travers le Canada, dit que les stratégies de mobilisation de l’organisation ont touché environ 200 000 jeunes à travers le pays lors de cette élection. Elle remarque notamment, lors de cette campagne électorale, une prise de conscience accrue chez les jeunes. Alors que pour les élections passées, plus de la moitié des jeunes approchés par son équipe ne savaient pas qu’une campagne électorale était en cours, « cette fois-ci, 70 à 80 % des jeunes sont au courant ». « Il n’y a pas d’apathie ni de résistance à voter. Il y a une forte volonté d’agir sur les questions qui préoccupent les jeunes et de s’assurer qu’ils votent. » Des préoccupations similaires Jon Pammett, professeur à la retraite de l’Université Carleton, dont les recherches ont déjà contribué aux rapports sur la participation électorale d’Élections Canada, dit qu’il s’attend à ce que les jeunes soient plus enclins à voter cette fois-ci en raison des « questions qui leur tiennent à cœur ». Et ces questions ne sont peut-être pas si différentes de celles qui motivent les électeurs plus âgés. « Je ne pense pas que les questions qui préoccupent les jeunes dans cette élection soient différentes de celles qui concernent la population en général », dit M. Pammett, citant la création d’emploi, l’accessibilité au logement et la guerre commerciale avec les États-Unis comme les principaux enjeux. Dans un sondage en ligne réalisé par Léger, 64 % des personnes interrogées âgées de 18 à 34 ans ont répondu « oui, certainement » et 23 % « probablement oui » lorsqu’on leur a demandé si elles avaient l’intention de voter aux élections. Seulement 4 % ont répondu catégoriquement qu’elles ne voteraient pas. Joel Westheimer, professeur à l’Université d’Ottawa qui étudie la démocratie et l’éducation, affirme que même si ce n’est pas le cas pour tous, certains jeunes sont « désabusés par la politique des partis ». « Il y a un sentiment selon lequel le gouvernement est dysfonctionnel, qu’il n’arrive pas à faire avancer les choses », explique M. Westheimer. Il donne comme exemple l’« inefficacité » des gouvernements du monde entier dans la lutte contre les changements climatiques, une question qui, selon lui, est importante pour les jeunes. « Les jeunes ont été témoins de cela toute leur vie, et ils se sont donc détournés de ce type de politique et sont davantage attirés par d’autres formes d’engagement politique. » M. Westheimer ajoute que les jeunes sont moins susceptibles d’adhérer à un parti politique en particulier, mais plus enclins à participer à des manifestations et à d’autres formes d’action politique. Plus d’ouverture de la part des partis Jaden Braves, fondateur et p.-d.g. de l’organisation à but non lucratif Jeunes politiciens du Canada, dit qu’une ouverture à écouter des jeunes pourrait contribuer à mobiliser les jeunes générations. « Si les partis pouvaient montrer ou même dire ouvertement qu’ils veulent impliquer les jeunes et les motiver à voter pour eux, cela en dirait déjà long, dit-il. Il est difficile de mobiliser les jeunes électeurs autour d’une question particulière, mais je pense que le moins que l’on puisse faire est d’intégrer dans son programme des mesures qui touchent les préoccupations des jeunes et de voir si cela les mobilise. » M. Braves cite le coût de la vie et les droits de scolarité dans l’enseignement supérieur parmi les principales préoccupations. « Les jeunes Canadiens sont l’avenir de toutes les décisions. Si nous ne votons pas pour quelqu’un qui donnera la priorité à nos voix, qui nous mettra au premier plan et qui tiendra compte des jeunes dans son programme, nous ne défendons pas grand-chose. Nous devons nous mobiliser et nous assurer d’élire une personne, un parti ou un groupe de personnes qui ont à cœur nos intérêts. »