Kathrine Huet admet avoir vécu les lendemains de l'accident avec beaucoup de difficulté. (Bell Média) Kathrine Huet se tord de douleur quand elle prononce ces mots, entre deux sanglots. Lors d’une épreuve particulièrement éprouvante à Survivor Québec, tournée aux Philippines le 28 février dernier, elle venait de recevoir une lourde soucoupe de pierre sur la tête. L’accident la laisse avec une lacération à l’œil gauche et une fracture de l’orbite. Jamais un candidat de Survivor Québec n’est resté avec des blessures aussi graves. «C’est comme si je m’étais fait frapper par un autobus», confiera-t-elle plus tard à l’animateur Patrice Bélanger. Mais c’est à sa présence à Survivor que pense d’abord la courtière immobilière et ancienne productrice de radio, qualifiée de «force tranquille» de cette troisième saison. «Le mot que tu ne veux pas entendre. Le cauchemar des joueurs de Survivor!» écrivait-elle sur les réseaux sociaux au lendemain de son éviction, ordonnée par l’équipe médicale au 17e jour de la compétition. Les vrais de vrais fans de Survivor savent que le jeu comporte ses risques, parfois plus graves que d’autres. Aux États-Unis, sur les 48 saisons de l’émission, la majorité des 19 «medevacs» – c’est ainsi qu’on appelle les candidats évacués – l’ont été pour causes de déshydratation ou d’infection. C’est dire la gravité de l’accident dont Kathrine a été victime. Deux mois après l’accident, la candidate vit encore avec les effets secondaires de la commotion cérébrale qu’elle a subie. «Je cherche mes mots, j’ai de la difficulté avec la lumière, le son. Le mouvement de mon œil gauche est restreint. Quand je regarde du côté gauche, je vois double.» Kathrine Huet a déposé cette photo d'elle sur sa page Facebook près de deux mois après l'accident. (Kathrine Huet) Elle ignore encore si cette séquelle sera permanente. «La fracture de l’orbite n’est pas suffisamment importante pour nécessiter une opération. J’ai eu une hémorragie dans l’œil qui a laissé un hématome. Malgré tout, j’ai bien espoir que tout se replace.» Je connais bien Kathrine Huet, qui produisait l’émission du regretté Paul Houde au 98,5, à laquelle j’ai participé avec un plaisir immense il y a quelques années. Une fille positive, stimulante, le genre de personne pour qui tu veux donner le meilleur. Et qui donne le meilleur d’elle-même. C’est ce que j’ai retrouvé chez elle quand je l’ai vue à Survivor. Vaillante et brave, Kathrine était appréciée des autres et comptait sur des alliés fiables. (Bell Média) Le décès de Paul Houde, survenu un an et deux jours avant l’accident, a laissé un grand vide chez Kathrine Huet. Déjà une très grande fan des versions américaine et australienne de Survivor, c’est un peu pour prouver quelque chose à ce grand complice qu’elle a posé sa candidature pour y participer. Il en avait été question entre eux quand Paul avait reçu l’animateur Patrice Bélanger à la radio. «Paul ne savait pas trop ce que j’allais faire là, comme si je n’étais pas capable. Ça m’a mise au défi et j’ai vu l’opportunité en envoyant ma vidéo. J’étais destinée à y aller», me confie-t-elle aujourd’hui. Mais sachant ce qui est arrivé, le jeu en valait-il la chandelle? «Je cherche encore le sens de ce qui est arrivé. Je ne regrette pas. Je suis partagée entre la chance que j’ai eue de participer et la façon dont ça s’est terminé. Au final, c’est plus positif que négatif.» Un peu plus sereine après coup, elle admet néanmoins avoir vécu les lendemains avec beaucoup de difficulté. «J’en ai passé des nuits à ne pas dormir et à me demander: pourquoi? Qu’est-ce qui fait que ça va si bien et que ça se termine comme ça. C’est quoi le message que la vie m’envoie?» «Patrice [Bélanger] m’a écrit et a trouvé les bons mots pour que je me sorte de cette spirale-là. Il y a plusieurs façons de sortir de ce jeu-là et l’explication médicale fait partie de celles-là.» — Kathrine Huet Elle s’est aussi demandé où Paul Houde pouvait bien être quand la pierre lui est tombée sur la tête, quelle comète son ange gardien pouvait-il encore observer plutôt que de veiller sur elle. Malgré l’importance de ses blessures, Kathrine n’a aucun reproche à faire à la production. «Toutes les épreuves sont testées et celle de la soucoupe, je l’avais déjà vue dans la version américaine. [...] Jamais, je n’ai senti que la production avait quoi que ce soit à voir là-dedans. C’est vraiment un accident.» Plusieurs croyaient Kathrine capable de se rendre jusqu’au bout et même de remporter la victoire. «J’avais de bonnes chances mais il y a tellement de twists dans Survivor, il peut arriver n’importe quoi. Tu peux être au top d’une alliance et le lendemain, au bas de l’alliance.» Alors que des participants se forgent dès le départ une mauvaise réputation, Kathrine était appréciée des autres et comptait sur des alliés fiables. «J’étais en très bonne position», reconnaît-elle. Kathrine a notamment eu de bons mots pour Léanne, qui a été éliminée. (Bell Média) Même blessée, la battante veut sa revanche. «Ceux qui connaissent bien Survivor le savent: il y a souvent des all stars et des éditions spéciales “seconde chance”, avec des joueurs “medevacs” qui sont revenus par la suite. Pour moi, ça reste une expérience inachevée. Je ne saurai jamais jusqu’où j’aurais pu me rendre. S’il y avait une ouverture, je serais la première à lever la main pour y retourner.» La diffusion de l’accident et de sa sortie de l’émission l’a enfin libérée de son secret, elle qui en porte toujours les marques à ce jour. «J’ai été arrachée à la production, je n’ai pas eu le temps de dire au revoir aux autres. En regardant la série, j’avais l’impression de retrouver ma gang.» Depuis son retour au pays, elle a pris contact avec certains de ses camarades. «C’est avec Jérémie que j’ai noué les liens les plus forts. Même s’il n’est pas sorti pour des raisons médicales, il a été brisé autant que moi. C’est en partageant notre expérience qu’on s’est apporté du soutien.» «Jérémie a été mon coup de cœur et c’est un ami pour la vie!» — Kathrine Huet Étonnamment, revoir la scène de l’accident à l’écran l’a rassurée. «Jusque là, je me demandais sans arrêt comment j’aurais pu éviter l’accident. En voyant les images de la soucoupe qui me tombe sur la tête, j’ai bien vu qu’il n’y avait aucune issue, il n’y a rien que j’aurais pu faire. Ça m’a apaisée.» Ce n’est pas tant pour que Paul la voit réussir des épreuves qu’elle souhaitait faire Survivor, mais pour lui prouver qu’elle pouvait prendre la parole en public, lors du confessionnal quotidien. «Paul a toujours espéré qu’on fasse quelque chose ensemble à la caméra. Entre lui et moi, il y avait quelque chose à prouver à ce niveau-là. J’aurais aimé qu’il voit ça», me dit-elle, la gorge nouée par l’émotion. S’il y a une chose qui permet à Kathrine de conjurer le mauvais sort, ce sont les encouragements du public. «J’en reviens pas de l’amour que je reçois. C’est incroyable. Quand je dis que je cherche un sens, cet amour-là vient mettre un baume sur la blessure physique et morale que je tente de cicatriser.» Pour sa troisième saison, l’émission de Patrice Bélanger rallie en moyenne 593 000 fidèles en semaine et 733 000 le dimanche soir sur Noovo, en plus des 680 000 visionnements sur le site de la chaîne. Sur Crave, elle connaît une hausse de fréquentation de 123% en comparaison avec la saison dernière. Pour réagir à cette chronique, écrivez-nous à opinions@lesoleil.com. Certaines réponses pourraient être publiées dans notre section Opinions.