Les autorités en parlent comme d’une «opération exceptionnelle» et d’une «première en France» dans la lutte contre le narcotrafic. Le parquet de Rennes a annoncé ce vendredi 4 avril les arrestations de 30 personnes la nuit dernière après une opération dite de «drop off», soit le fait de lancer de la cocaïne depuis un bateau afin qu’un autre équipage puisse le récupérer discrètement plus loin. Dans le détail, les personnes interpellées sont six hommes, dont trois marins-pêcheurs, et deux femmes, âgés de 25 ans à 49 ans, ainsi que 22 marins d’origine philippine. Environ 800 kilogrammes de cocaïne ont été découverts dans un bateau. Les arrestations se sont faites en deux temps. D’un côté, les six hommes et deux femmes ont été interpellés à Tancarville et au Havre (Seine-Maritime) et à Ouistreham (Calvados). Dans le même temps, un navire venant du Brésil et se dirigeant vers Amsterdam, identifié «comme étant celui qui a transporté les stupéfiants à proximité des côtes françaises», a été dérouté par les garde-côtes français vers le port de Dunkerque (Nord). Le parquet de Rennes s’est félicité du «déploiement des moyens de l’ensemble des forces de sécurité intérieures françaises» qui a permis «de matérialiser pour la première fois une importation massive de cocaïne via la technique du “drop off”, qui ne se traduisait jusqu’alors que par des échouages massifs de marchandise perdue sur les plages». Au terme de 18 mois d’investigation, l’opération nocturne pour arrêter les 30 suspects a mobilisé 100 policiers et 70 gendarmes, selon le procureur de la République de Rennes, Frédéric Teillet. L’enquête préliminaire datant du 19 octobre 2023, devenue une information judiciaire le 19 février 2024, a été ouverte notamment des chefs d’importation en bande organisée de produits stupéfiants, de trafic de stups, de participation à une association de malfaiteurs en vue de commettre un crime et de blanchiment. Le dernier rapport de l’agence des Nations unies sur les drogues a confirmé la prépondérance du secteur maritime pour l’acheminement de la cocaïne vers l’Europe et en particulier la France. Cette technique du «drop off» a longtemps été réservée à l’Amérique latine et aux Caraïbes. La multiplication ces dernières années des ballots de drogues échoués sur les plages du littoral français est le signe d’une recrudescence de cette stratégie chez les trafiquants. Selon les experts, ces écueils dans la livraison peuvent s’expliquer par plusieurs facteurs. Pèle mêle, une balise GPS qui ne fonctionne pas, un contrôle des douanes au prochain port, une cargaison qui tombe à l’eau au mauvais moment ou encore une mer agitée. En septembre, une marée blanche de ballots, chacun contenant plusieurs dizaines de kilos de cocaïne, s’est répandue sur les plages de Courseulles-sur-Mer (Calvados) ou encore de Saint-Marcouf (Manche). 53,5 tonnes de cocaïne saisies en 2024 Cette nouvelle affaire menée le long des côtes normandes confirme la tendance après une année 2024 sans précédent. Un total de 53,5 tonnes de cocaïne a été saisi l’année dernière, soit une hausse de 130 % par rapport à 2023. La lutte contre le narcotrafic est une priorité du tandem Bruno Retailleau et Gérald Darmanin.