Condamnation de Marine Le Pen : En s'attaquant à la justice, le RN met à mal sa dédiabolisation
Une démonstration de force ? Le Rassemblement national lance sa riposte après la condamnation de Marine Le Pen à cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire pour détournement de fonds publics lundi dernier. Le mouvement a lancé une pétition et organise un grand meeting dimanche pour soutenir la cheffe de file du RN, qui a fait appel de la décision. Une mobilisation autour d’un mot d’ordre : « sauvons la démocratie ». Car depuis le coup de massue de lundi, les responsables RN fustigent « la dictature des juges » et le « coup d’Etat judiciaire ». Une posture « antisystème », qui prend le risque d’une rediabolisation accélérée du parti. « L’objectif du meeting est de protester contre cette barbouzerie judiciaire qui vise à empêcher Marine Le Pen, donnée à 37 % dans les sondages, d’être candidate », dénonce Philippe Olivier, eurodéputé RN. « ll faut marquer le coup, nous ne sommes pas des sous-citoyens. Ce meeting est une résistance à l’oppression, nous ne nous laisserons pas faire », ajoute-t-il. Le discours de ce proche conseiller de la triple candidate à la présidentielle s’inscrit dans la stratégie du mouvement depuis lundi. Faire feu de tout bois contre l’institution judiciaire et les juges pour contester les condamnations dans l’affaire des assistants parlementaires européens. « Le système a sorti la bombe nucléaire », a ainsi évoqué Marine Le Pen mardi. Jordan Bardella a pour sa part évoqué une « tyrannie des juges rouges », ce jeudi. Une contre-attaque au lance-flammes, que l’annonce d’un jugement en appel à l’été 2026, soit bien avant le début de la présidentielle, n’a pas tempéré. « Il n’y a pas d’excès d’optimisme avec cet appel car le mal est déjà fait avec l’exécution provisoire. Bénédicte de Perthuis et les deux autres juges ont pris une décision injuste où les principes élémentaires du droit n’ont pas été respectés », tranche Andréa Kotarac, porte-parole du RN. La juge du tribunal de Paris vertement critiquée par le RN a été prise pour cible sur les réseaux depuis son jugement et vit désormais sous protection policière. « Un mauvais remake du Capitole » Des attaques condamnées par les responsables RN, mais leur discours « antisystème » met à mal la « stratégie de la cravate », qui vise à dédiaboliser le parti depuis plusieurs années. « Nous assistons à une attaque en règle, massive et sans précédent récent, contre notre État de droit », a ainsi regretté Gabriel Attal. L'ancien Premier ministre a d'ailleurs transformé le meeting prévu de longue date par Renaissance dimanche en rassemblement « pour défendre la démocratie, la République et nos valeurs ». « On ne pouvait pas ne pas réagir face à ce risque. Le RN retourne à ses réflexes primaires. Au droit, ils opposent les sondages. A la loi, ils vous répondent les électeurs. Ce sont des ressorts populistes », met en garde l’ex-avocate Eléonore Caroit, députée Ensemble des Français établis en Amérique latine et aux Caraïbes. A droite, Xavier Bertrand a même comparé le rassemblement de soutien à Marine Le Pen à « un mauvais remake du Capitole » envahi en 2021 par les partisans de Donald Trump. A gauche, Jean-Luc Mélenchon y voit un « rassemblement de fachos ». Avec cette séquence, le RN est renvoyé au « Front national » version Jean-Marie Le Pen, que sa fille Marine tente depuis plusieurs années de gommer. « Des vautours et des sectaires » « Nos adversaires essayent de nous caricaturer en factieux, alors que depuis lundi, pas un seul de nos militants n’a fait preuve de violence. 500.000 personnes ont signé la pétition de soutien en silence », balaie Charles Alloncle, député UDR de l’Hérault. « Cette riposte pacifique est très digne », poursuit ce proche d’Eric Ciotti. « Il n’y a aucune pression de notre part, les insultes des vautours et des sectaires anti-RN comme Gabriel Attal sont ridicules », ajoute Andréa Kotarac. Le patron de Renaissance accueillera François Bayrou et Edouard Philippe à son événement de Saint-Denis. Les Ecologistes et LFI ont, eux, appelé à un rassemblement « contre l’extrême droite » le même jour, place de la République à Paris. On ne sait pas encore si Marine Le Pen pourra être candidate en 2027. Mais la journée de dimanche a déjà des airs de campagne présidentielle.