Guerre en Ukraine : Poutine ordonne un cessez-le-feu à l’occasion de Pâques

Sitôt annoncé, sitôt dénoncé. La Russie a annoncé dimanche 20 avril avoir «repoussé» des attaques nocturnes de l’Ukraine, au lendemain de la proposition de cessez-le-feu de Vladimir Poutine. Auparavant, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait accusé la Russie de violer son propre cessez-le-feu. «Dans l’ensemble, le matin de Pâques, nous pouvons affirmer que l’armée russe tente de donner l’impression générale d’un cessez-le-feu, tout en poursuivant dans certaines régions des tentatives isolées d’avancer et d’infliger des pertes à l’Ukraine», a-t-il écrit, citant un rapport du commandant en chef de l’armée ukrainienne, Oleksandre Syrsky. Entre 18 heures locales et minuit, ce rapport signale «387 bombardements et 19 assauts par les forces russes» ainsi que l’usage de dizaines de drones. Depuis minuit «il y a déjà eu 59 cas de bombardements et 5 assauts d’unités russes». «La Russie doit se conformer pleinement aux conditions du cessez-le-feu. La proposition de l’Ukraine de mettre en œuvre et de prolonger le cessez-le-feu pendant 30 jours après minuit ce soir reste sur la table», a déclaré Volodymyr Zelensky dans un message posté dimanche. Un mort dans la région de Kherson Dès samedi soir, le chef d’Etat avait fait état d’«assauts russes [...] dans plusieurs secteurs du front». Le responsable de l’administration militaire de Kherson, Oleksandre Prokoudine, dans le sud de l’Ukraine, avait fait état samedi soir d’un mort «pris dans une attaque combinée ennemie» dans la localité de Stanislav. «Une attaque de huit drones russes» a mis le feu à des appartements dans une tour d’habitation et, plus tard dans la soirée, trois drones ont frappé deux villages, tandis que l’armée de l’air ukrainienne déclenchait des alertes aux raids aériens dans plusieurs régions de l’est, avait-il indiqué. «Les combats se poursuivent et les attaques russes continuent», a déclaré samedi soir le chef d’état-major de l’armée ukrainienne. «Dans certaines zones de la ligne de front, l’artillerie russe continue d’être entendue, malgré la promesse de silence du dirigeant russe. Des drones russes sont utilisés.» Le président russe Vladimir Poutine avait ordonné plus tôt à ses troupes d’observer un cessez-le-feu en Ukraine à l’occasion de Pâques, à partir de 15 heures et jusqu’à la nuit de dimanche à lundi, appelant Kyiv à faire de même, au moment où les discussions en vue d’une trêve plus globale semblent dans l’impasse. «Guidée par des considérations humanitaires, la partie russe déclare une trêve de Pâques aujourd’hui [...]. Je donne l’ordre de cesser toutes les hostilités pendant cette période», a déclaré Vladimir Poutine lors d’une réunion retransmise à la télévision russe. «Nous supposons que la partie ukrainienne suivra notre exemple», a-t-il ajouté, tout en ordonnant à ses forces de se tenir prêtes à une «réponse immédiate et complète» en cas de «violations de la trêve» ou de «toute action agressive» de la part des soldats de Kyiv. Selon le chef de l’Etat russe, la réponse ukrainienne «montrera la sincérité du régime de Kyiv, sa volonté et sa capacité à respecter les accords, à participer au processus de pourparlers de paix visant à éliminer les causes profondes de la crise ukrainienne». Zelensky propose un cessez-le-feu «au-delà du 20 avril» De son côté, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait dénoncé une «tentative de jouer avec les vies humaines» de la part de son homologue russe Vladimir Poutine, soulignant que «des drones d’attaque russes ont été détectés» dans le ciel ukrainien. Plus tard dans la journée, le ministre ukrainien des Affaires étrangères a affirmé que l’Ukraine attendait «des actes, pas des paroles». «Poutine vient de faire des déclarations sur sa prétendue disposition à un cessez-le-feu», a écrit Andriy Sybiga sur les médias sociaux. «Nous savons que ses paroles ne sont pas dignes de confiance et nous examinerons les actes, pas les paroles», a-t-il ajouté. En début de soirée samedi, le président ukrainien a finalement affirmé que l’Ukraine allait respecter le cessez-le-feu ordonné quelques heures plus tôt par Vladimir Poutine à l’occasion de Pâques, tout en accusant la Russie de le violer. «Si la Russie est prête à vraiment s’engager, l’Ukraine fera de même - ses actions reflétant celle de la Russie», avait écrit le président ukrainien sur X, ajoutant qu’il proposait «d’étendre le cessez-de-feu au delà du 20 avril». Des tentatives d’instaurer une trêve à l’occasion de Pâques en Ukraine ont déjà eu lieu à deux reprises depuis le début du conflit en février 2022. En avril 2022, une première initiative en ce sens, prise par le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres, ne s’était pas matérialisée du fait du refus de la Russie, qui avait jugé qu’un cessez-le-feu donnerait l’occasion à l’armée ukrainienne de se regrouper et de se réarmer. L’année suivante, en janvier 2023, le patriarche de l’Eglise orthodoxe russe Kirill avait exhorté les deux camps à interrompre les hostilités pour Pâques et la Russie avait décrété un cessez-le-feu de 36 heures mais celui-ci avait été qualifié de «piège» par l’Ukraine et les affrontements avaient continué. Echange de 240 prisonniers de chaque côté L’annonce de Vladimir Poutine intervient alors que la Russie affirme avoir reconquis 99 % des territoires occupés par l’Ukraine dans la région de Koursk. «La majeure partie du territoire de la région où l’invasion a eu lieu a maintenant été libérée. Il s’agit de 1 260 kilomètres carrés, soit 99,5 % du territoire de la région», a dit à la télévision le chef d’état-major russe, Valeri Guerassimov, au président Vladimir Poutine. Une telle progression déplacerait à nouveau les combats en totalité sur le sol ukrainien. La Russie a annoncé par ailleurs ce samedi avoir échangé plus de 240 prisonniers de guerre de chaque côté avec l’Ukraine dont des soldats blessés nécessitant des soins d’urgence, ce type d’échange restant l’un des derniers domaines de coopération entre les deux pays. Impatience américaine L’annonce de trêve samedi intervient également alors que les efforts de l’administration de Donald Trump pour trouver une issue au conflit en Ukraine paraissent dans l’impasse ces derniers jours, ce qui a provoqué l’irritation du président américain. Donald Trump a menacé vendredi de se retirer des négociations sur l’Ukraine faute de progrès rapides dans les discussions séparées avec Kiev et avec Moscou que ses lieutenants ont depuis plusieurs semaines. Le même jour, le Kremlin avait indiqué considérer comme ayant «expiré» le moratoire sur les frappes contre les sites énergétiques, annoncé en mars pour 30 jours mais dont la mise en oeuvre restait floue. La Russie et l’Ukraine s’accusaient de surcroît presque quotidiennement de le violer. Avant l’annonce de cette trêve limitée aux sites énergétiques, Donald Trump avait initialement proposé un cessez-le-feu inconditionnel et complet, dont le principe avait été accepté par Kyiv sous la pression de Washington mais écarté par Vladimir Poutine.