Une poussée du Bloc pour que «les indécis rentrent à la maison»

Si la qualité d’une journée de campagne était évaluée au nombre de kilomètres parcourus, le Bloc québécois aurait obtenu la note d’A +, samedi. L’autobus bleu pétant de la formation politique souverainiste s’est réveillé à Mont-Laurier, dans les Laurentides, a avalé près de 300 kilomètres d’asphalte vers Val-d’Or, puis a rebroussé chemin après deux petites heures dans la ville abitibienne pour effectuer un « chapelet » d’arrêts — une expression du chef bloquiste, Yves-François Blanchet — vers Vaudreuil. À s’en fier au plan détaillé du Bloc pour la journée, quelque 900 kilomètres se seront ajoutés à l’odomètre de la caravane, samedi. Mais la route ne fait pas foi de tout. En matinée, deux jours avant le vote, l’équipe de campagne bloquiste a vu apparaître sur ses écrans un nouveau coup de sonde de la firme Léger. Les résultats sont on ne peut plus clairs : « les intentions de vote fédérales se maintiennent au Québec », a écrit le sondeur, plaçant le Parti libéral du Canada (42 %) bien devant le Bloc (26 %) et le Parti conservateur du Canada (24 %). Yves-François Blanchet l’a déjà dit : il se « fou [t] un peu » des sondages. À Shawinigan vendredi, il avait indiqué « réfuter avec enthousiasme l’hypothèse d’une cristallisation » des intentions de vote, qui laissent pour l’instant croire qu’il perdra des sièges plutôt que d’en gagner. Il n’en a donc pas fait grand cas quand le président-fondateur de Léger, Jean-Marc Léger, a qualifié la campagne 2025 d’« inutile » dans les pages du Journal de Montréal, le lendemain matin. « Je continue à dire que, malheureusement, même si c’est intéressant en termes d’analyse, il y a une disproportion entre le temps accordé aux enjeux de la campagne et le temps accordé à l’analyse des chiffres de la campagne, ce que j’appelle “regarder le tableau indicateur plutôt que la game” », a illustré M. Blanchet depuis Val-d’Or, quelques heures après avoir correctement prédit le résultat d’une autre « game », la troisième de la série Canadien-Capitals. « Les indécis » dans le viseur de Blanchet Malgré le peu de temps qu’il a passé dans le « 819 » samedi — il a répondu aux questions des médias pendant 25 minutes et effectué un court arrêt dans le local électoral d’Abitibi–Baie-James–Nunavik–Eeyou à Val d’Or —, le chef bloquiste ne doute pas un instant des chances de succès de ses candidats en Abitibi-Témiscamingue. Devant une petite foule de militants du coin, M. Blanchet a prononcé quelques mots d’espoir : « Tout indique que les indécis, présentement, rentrent à la maison. » À ses côtés, quelques instants auparavant, la députée sortante et candidate dans Abitibi — Baie-James — Nunavik — Eeyou, Sylvie Bérubé, s’était dite « confiante » de sortir gagnante de la dure bataille qu’elle livre à l’ancienne grande cheffe du Grand Conseil des Cris, Mandy Gull-Masty, candidate du Parti libéral du Canada. Dans la plus grande circonscription fédérale du Québec, il est impossible de prédire les résultats à ce jour ; le site agrégateur de sondages 338Canada place les candidates libérale et bloquiste à égalité statistique, quoique ses calculs comportent une importante marge d’erreur de 8 %. Le candidat du Bloc dans la circonscription voisine, Sébastien Lemire, est « assez convaincu » de la victoire de sa collègue Bérubé. Le député sortant s’attendait à un « certain intérêt » envers la candidature libérale, mais celui-ci « n’a pas été aussi élevé [qu’il aurait] pu penser l’observer ». « Parce que, notamment, on sent qu’il y a un clivage, vraiment, entre les intérêts du Nord puis du Sud. Des gens de l’Abitibi-Témiscamingue ne se sont pas retrouvés dans la candidature libérale, puis ça, ç’a eu un impact », a-t-il confié à une poignée de journalistes de la caravane électorale. À lire aussi Interactif | Comparez les promesses des partis aux élections fédérales 2025 Un passage tardif Élu depuis 2019, M. Lemire ne prend rien pour acquis, mais 338Canada lui donne 99 % des chances d’aller chercher un troisième mandat. « La campagne a très, très bien été », a-t-il glissé, avant de laisser entendre en conférence de presse qu’il aurait aimé voir son chef chez lui avant le jour 35. « S’il était arrivé plus tôt, peut-être qu’on l’aurait pris aussi plus tôt. » De retour devant le micro, Yves-François Blanchet n’a pas manqué de préciser que sa caravane, même si elle était pour la première fois de la campagne en Abitibi-Témiscamingue, avait fait des arrêts dans « le 418, le 819, le 438, le 450, le 514… » Depuis le 23 mars, « tous les indicatifs régionaux nous ont gratifiés de leur accueil », a-t-il dit. En plus de Val-d’Or, l’agenda du chef bloquiste samedi comptait des événements à Mont-Laurier (sur le chemin du retour), Sainte-Adèle, Sainte-Thérèse et Pointe-aux-Trembles. Toutes ces villes et quartier sont représentés par des députés sortants du Bloc, sauf Sainte-Adèle, qui se trouve en plein cœur d’une nouvelle circonscription : Les Pays-d’en-Haut. À la dissolution de la Chambre des communes, le Bloc possédait 33 sièges, dont près de la moitié à Montréal et dans ses couronnes.