A Toulon, un parfum de Tahiti flotte dans les restaurants

Quel est le point commun entre le port de Toulon, les halles municipales et le cours Lafayette? En plus d’être des lieux emblématiques du centre-ville, ils accueillent tous, directement ou à quelques mètres seulement, au moins un commerce polynésien. Signe, sans doute, que les produits des archipels ont conquis Toulon et - au moins - une partie de ses habitants. En une dizaine d’années à peine, quatre boutiques ont en effet ouvert leurs portes dans un rayon de 600mètres. Cela a commencé en 2012 avec le restaurant de Jonathan, né à Toulon d’un père marin et d’une mère tahitienne. Aujourd’hui installé au 41 rue du Mûrier, Ma’a Tahiti (pour "cuisine tahitienne") propose une carte faisant la part belle aux spécialités du Pacifique. "Des gens arrivent de Paris" Du ma’a tinito au sashimi de thon en passant par le chao men, le poisson cru à la chinoise ou encore le poe banane, l’établissement entend faire voyager avec la cuisine polynésienne… Et pas que. "L’idée, c’est de t’immerger dans ma culture, présente le gérant. La musique, les odeurs, la décoration… Tu ne viens pas seulement manger une salade tahitienne!" Dans ce lieu axé sur le dépaysement, qui accueille occasionnellement des groupes de danse et de musique traditionnelles, on s’adresse aussi bien aux Polynésiens qu’aux simples curieux ou amoureux de Tahiti. "Certains veulent juste une chose: retourner là-bas", remarque Jonathan. À chaque trimestre, il leur en offre d’ailleurs la possibilité, avec un concours mettant en jeu un voyage vers les îles. "Il y a douze ans, reprend le commerçant, c’était un pari de revenir dans le centre-ville. Mais je pense que ce concept qui n’était pas du tout connu est devenu fort au fil du temps." Si bien qu’il compte désormais l’exporter dans d’autres villes françaises… Dans le local voisin, en revanche, la question de se développer ailleurs ne semble même pas s’être posée. "En France, Toulon est l’un des endroits où il y a le plus de Tahitiens. Je n’aurais pas d’intérêt à faire ma boutique à Montpellier!", lâche Temehani. Arrivée sur la côte varoise pour suivre son mari militaire, elle a ouvert Temehani créations en 2023. Là, dans ce commerce où le tutoiement est de mise, elle vend toutes sortes de produits faisant écho à l’île d’amour. Et entre vêtements, accessoires, fleurs, cosmétiques, rames et ukulélés, les inconditionnels du territoire ultramarin ont tout pour trouver leur bonheur. "Je fabrique même des bijoux avec des perles de Taha’a", ajoute la vendeuse, qui assure recevoir régulièrement des Polynésiens venus des quatre coins de France. "Parfois, des gens arrivent de Paris juste pour manger au restaurant tahitien et passer à la boutique, affirme-t-elle. En fait, la plupart des clients sont des militaires, qui viennent faire un tour lorsqu’ils descendent dans le Var. Ils aiment bien retrouver l’état d’esprit du Pacifique…" Cuisine "riche" et "saine" Les traditions et odeurs du fenua (la "terre", en tahitien), c’est aussi ce qui amène les gourmands à rallier le restaurant Fenua Food by te Aki, sur le port. La Tahitienne Mahi - "tombée amoureuse des fromages et saucisses" de la Métropole - et son mari marquisien ont repris l’affaire l’an dernier. "On a changé la carte et les recettes. On va aussi modifier la décoration petit à petit", souffle la restauratrice. Les classiques de la cuisine d’outre-mer sont préparés du mardi au dimanche. Mentions spéciales pour le pua’a sauce huître (qui a fait son apparition au menu), les produits frais de te miti ("la mer", en tahitien) et le traditionnel gâteau mimosa. "Ici, c’est le retour aux sources, prône Cynthia, sœur de Mahi. Les gens se sentent comme à la maison." La clientèle, composée en majorité de marins et Tahitiens, vient y chercher une atmosphère familière. Organisées tous les mois, les soirées musicales sont, par exemple, particulièrement appréciées. "Les 28 et 29 mai prochains, on va faire venir des stars de Tahiti, annonce la gérante. Ça va rassembler 200 à 300 personnes!" Mieux vaut donc bloquer sa place dès à présent… Chez Tiki Food, par contre, pas besoin de réserver... Mentalité street food et roulotte oblige! Amar, restaurateur vivant entre le Var et la Polynésie, a ouvert il y a quelques mois ce stand aux halles de Toulon. On y retrouve la plupart des mets polynésiens, tels que "le poulet fafa, le poisson cru au lait de coco, ou même des sandwichs avec du chao men dedans". "La cuisine polynésienne n’est pas très connue, mais elle est saine et a une vraie richesse, explique Amar. Avec le flux monstrueux des halles, on a cette chance de pouvoir faire découvrir cela à une clientèle diversifiée. Et, au final, la curiosité fait revenir les gens. On représente ici la Polynésie, son côté convivial, bonne franquette, et c’est très plaisant!" Dans le prochain épisode: Toulon, un deuxième fenua?