Après des mois de travail, le cri de la victoire Nous étions perchés dans la galerie de presse du BMO Field. Mais même notre distance du terrain ne nous a pas empêchés d’entendre le cri de victoire de Yannick Girard. Les Roses de Montréal venaient de l’emporter 1-0 face aux joueuses de l’AFC Toronto, chez celles-ci. Et dès le coup de sifflet final, un son guttural s’est fait entendre, comme un gladiateur triomphant devant une foule hostile dans le Colisée de Rome. Était-ce l’entraîneur-chef Robert Rositoiu, qui sortait de son calme habituel pour faire preuve d’une grande émotion dans le cadre de cette première victoire historique ? On empoigne nos jumelles et on découvre que c’est plutôt le préparateur physique des Roses, les poings fermés, les bras écartés et la passion suintant de son visage. Désolé, votre navigateur ne supporte pas les videos Girard, c’est aussi l’ancien « prépa » de l’Impact de Montréal, de 2011 à 2017. La rivalité avec Toronto, il l’a bien connue. Si elle « n’existe pas encore au niveau féminin, c’est sûr que c’est toujours un petit plaisir spécial de gagner au BMO », a-t-il confirmé devant La Presse, mercredi dernier, à Laval. « Après, c’étaient surtout les longs, longs, longs mois de travail. La présaison était vraiment très longue. C’était 10 semaines avec les filles, mais nous, on a commencé au mois de novembre. C’est un peu l’aboutissement d’un gros travail, d’une réflexion qui a duré longtemps. » PHOTO ARLYN MCADOREY, LA PRESSE CANADIENNE Les Roses de Montréal ont remporté le premier match de leur histoire 1-0 face à l’AFC Toronto, samedi dernier. La physionomie du match a aussi joué dans cette exaltation finale. Les Roses ont marqué un but dès la deuxième minute de jeu et ont ensuite dû contenir les vagues répétées des attaques de Toronto. À ce titre, « la persévérance des joueuses, que ce soit physique ou mentale », a été l’un des aspects des siennes qu’il a préférés. « Il a ça en lui » « L’émotion de Yannick, je pense qu’elle démontre à quel point [tous nos entraîneurs] ont notre programme à cœur, et tout le temps et l’effort qu’ils y ont mis, a souligné la défenseuse américaine Lucy Cappadona, qui a fait ses débuts professionnels dans ce match. Ça te donne le goût d’être meilleure pour eux. » Pour Charlotte Bilbault, c’est une autre preuve de la « grinta » qui vit en Yannick Girard. « Il a ça en lui, dit-elle. Ça en dit long sur son caractère. Robert, Antoine et Maryse ont ça au quotidien. » Elle parle de Robert Rositoiu, entraîneur-chef, d’Antoine Guldner, préparateur mental et responsable de la culture de la performance, et de Maryse Bard-Martel, première adjointe de Rositoiu. « C’est notre unité qui sera notre force sur la saison. » « Les filles savent pourquoi elles le font » Nous sommes allés à l’entraînement de mercredi des Roses avec ce sujet en tête. Ça tombait bien, parce que Yannick Girard a justement mené une bonne partie de la séance cette journée-là. En l’occurrence, cet exercice exigeant à la fin de l’entraînement, lorsque les joueuses devaient sprinter, envoyer un centre dans la surface, n’avoir que 25 secondes de répit pour se repositionner, avant de sprinter à nouveau, et ce, pendant de longues minutes. « C’est comme ça qu’on évite les crampes en fin de match ! », lancera Rositoiu à un certain moment, comme un rappel de ce que les joueuses torontoises ont vécu samedi dernier. Et pendant ce temps, à travers le concert des marteaux et des perceuses qui construisent le stade des Roses, se distinguait le son perçant… du sifflet naturel que Girard créait par sa propre bouche, sans l’outil préféré des arbitres. « On m’a demandé souvent d’acheter un sifflet, mais c’est bon, je n’en ai pas besoin », rigolera-t-il par la suite. Il est même capable de faire différentes intonations, pour signaler par exemple la fin d’un exercice. Ça vient de très loin. Dès mon début dans le soccer, c’est un outil que j’utilisais. […] C’est une façon de ne pas avoir de sifflet dans la main. C’est devenu un peu ma marque de fabrique. Yannick Girard, à propos de son talent de siffleur Guldner et Girard travaillent ensemble depuis 15 ans, soit depuis leur temps ensemble à l’Impact de Montréal. L’un s’occupe de la préparation mentale, l’autre physique. « On a une philosophie et une méthodologie assez précises, dit Girard. Avec un développement à moyen-long terme, au lieu de tout pousser d’un coup. Nous, on a fait le choix de progresser tranquillement, de connaître les joueuses avant de leur proposer quelque chose de très intense. Ça a bien fonctionné pour ce match-là, après, ça ne veut pas dire que ça va fonctionner pour le prochain. » Il se réjouit de voir que les joueuses y « adhèrent ». Et il revient sur la fin de séance intense. « Ce que je leur ai demandé, c’est dur ! Ce n’est pas tout le monde qui le ferait. Cent mètres sprint et vingt-cinq secondes de récupération, ça fait mal. Mais ça ne rechigne pas. Les filles savent pourquoi elles le font. Elles savent qu’il y a du résultat derrière. C’est beaucoup plus facile. » Les Roses de Montréal disputeront leur deuxième match ce dimanche, contre le Rise de Vancouver, au BC Place, à partir de 15 h, heure de Montréal. Il sera diffusé sur RDS2 et CBC Gem.