Substances nocives dans les jouets: l'UE prend des mesures, qu'en est-il de la Suisse?
L'Union européenne va interdire les PFAS, surnommés "polluants éternels", ainsi que les perturbateurs endocriniens dans les jouets d'ici à 2030. Qu'en est-il en Suisse et comment limiter l'exposition des enfants à ces substances? On en parle fait le point avec Murielle Bochud, médecin-cadre à Unisanté et professeure de santé publique à l'Université de Lausanne (UNIL). Les enfants ne sont pas à l’abri de produits toxiques. Anneaux de dentition, peluches, jouets de plage et autres produits destinés aux plus jeunes peuvent contenir des PFAS, des perturbateurs endocriniens, des biocides ou encore des substances allergisantes. Autant de produits chimiques potentiellement nocifs pour l’organisme. Le 10 avril 2025, l’Union européenne est parvenue à un accord pour interdire ces substances dans les jouets vendus sur son territoire d’ici à 2030. Jusqu’ici, la directive en vigueur ne comportait aucune mention de PFAS. Il était question uniquement de substances dites "CMR" (cancérigènes, mutagènes, ou reprotoxiques), pour lesquelles des valeurs maximales étaient articulées. L’interdiction spécifique des PFAS, sauf dans les cas où l’enfant ne peut pas entrer en contact avec la substance, ainsi que d’un nombre accru de perturbateurs endocriniens, est une première, faisant de cette réglementation une étape importante en matière de protection des enfants contre les produits chimiques nocifs. Principe de précaution Utilisés par l’industrie depuis les années 1940 pour leurs propriétés imperméabilisantes, antiadhésives ou antitaches, les PFAS (ou substances per- ou poly-fluoro-alkylées) ne sont pas typiquement présents dans les jouets. Cependant leur présence n’est pas non plus exclue, d’où l’intérêt d’appliquer un principe de précaution, comme le relève Murielle Bochud, professeure de santé publique à l’Université de Lausanne et médecin-cadre à Unisanté, dans l’émission On en parle: "Il existe plusieurs milliers de PFAS. Beaucoup d’entre eux n’ont pas encore été étudiés, donc il y a de l’incertitude. Même si nous ne disposons pas de preuves claires que ces substances ont un impact sur la santé via certaines molécules, on peut suspecter qu’il y a potentiellement un danger, notamment pour les enfants et les femmes enceintes". Quant aux perturbateurs endocriniens, il s’agit d’une famille très large de substances qui agissent sur le système hormonal. Certains composants sont à la fois des PFAS et des perturbateurs endocriniens. La présence de ces molécules dans l’organisme est corrélée à certains troubles du développement, à des retards de puberté, ainsi qu’à des cancers, entre autres effets constatés. Une grande partie des jouets concernés "Une bonne partie des jouets sont concernés, dès qu’il y a des parties en plastique, colorées ou textiles. Tous ces types de jouets sont susceptibles de contenir des PFAS ou des perturbateurs endocriniens", explique Murielle Bochud. "Les enfants sont plus vulnérables à ces substances que les adultes. Idem lors de la croissance et la puberté. L’autre période de vulnérabilité est la grossesse avec l’exposition du fœtus." Les muqueuses, donc la bouche, sont l’une des voies d’exposition possibles aux substances nocives. "L’ingestion, alimentaire ou à travers les boissons, le contact cutané, l’inhalation via les poussières et pendant la grossesse à travers le placenta sont d’autres voies d’exposition", précise Murielle Bochud. La médecin donne quelques conseils: "s’il s’agit d’une peluche, nous recommandons de la laver avant le premier usage. S’il s’agit d’une figurine en plastique ou de pâte à modeler, examinez-les: si vous voyez le sigle CE, une certification européenne, cela signifie qu’elles répondent à certains standards stricts édictés par la communauté européenne." Le label CE est donc plutôt gage de qualité, puisque les critères de cette certification vont devenir encore plus exigeants avec l’interdiction des PFAS et perturbateurs endocriniens en 2030. Sujet radio: Catherine Rüttimann Adaptation web: Catherine Rüttimann et Myriam Semaani