C’est quoi le mouvement DDPF (Défense des droits des prisonniers français) ? Ces quatre lettres ont notamment été retrouvées taguées, avec de la peinture rouge, sur la porte du centre pénitentiaire de Toulon-La Farlède, attaqué dans la nuit de lundi à mardi par plusieurs personnes qui ont tiré à l’arme lourde sur l’entrée empruntée par les fourgons pénitentiaires. Les mêmes inscriptions ont également été découvertes ce mercredi dans le hall d’un immeuble où habite une surveillante pénitentiaire à Villenoy (Seine-et-Marne), où un début d’incendie a aussi été constaté. Depuis dimanche, une série d’attaques vise des prisons françaises, essentiellement via des incendies de véhicules, à Villepinte, Valence, Nanterre, Aix-Luynes, ou encore ce mercredi à Tarascon… Huit véhicules ont aussi été brûlés devant l’Ecole nationale de l’administration pénitentiaire (Enap) d’Agen, par des individus encagoulés qui ont pris la fuite. Un photomontage de Darmanin derrière les barreaux Le groupe DDPF a créé un canal Telegram le 12 avril, dans lequel il se présente comme « un mouvement dédié à dénoncer les atteintes à nos droits fondamentaux ». Il proteste par exemple contre la durée des promenades. « Nous sommes réduits à une promenade l’après-midi, un jour sur deux, et seulement pour une heure », écrit-il, contre « 2h30 le matin et 2h30 l’après-midi, il y a encore quatre ans ». Il pointe du doigt également « le coût des cabines téléphoniques, la suppression des activités », évoque des violences de surveillants et des « pressions physiques et psychologiques ». Et il vise clairement le ministre de la Justice Gérald Darmanin, que l’on voit derrière les barreaux dans un photomontage. Si l’ensemble des messages, parfois bourrés de fautes, manquent de cohérence, les attaques de ces derniers jours contre les prisons françaises y sont en tout cas largement relayées. Ce mercredi a aussi été publiée une vidéo menaçante à l’encontre d’un surveillant, dont le nom a été divulgué. Celle-ci, comme d’autres, a depuis été supprimée par Telegram. « La volonté de mettre les agents dans un climat de terreur et d’insécurité » Ces menaces inquiètent les syndicats de l’administration pénitentiaire. « Les menaces et les intimidations à l’intérieur, c’est le lot quotidien », observe le secrétaire national de l’Ufap Unsa Justice, Wilfried Fonck, « que ça le devienne à extérieur, c’est inquiétant ». Il dénonce un « mode opératoire qui atteint un autre niveau » avec « la volonté de mettre directement les agents dans un climat de terreur et d’insécurité ». Emmanuel Baudin, secrétaire général du syndicat FO-Justice, évoque quant à lui « la crainte de mouvements collectifs à l’intérieur des établissements ». Mercredi matin, « des forces de l’ordre étaient présentes à la prise de service des agents », selon le représentant FO, appelant les surveillants à la « discrétion ». « De jeunes délinquants payés quelques milliers d’euros pour faire ce genre de choses » Mais qui pourrait se cacher derrière ce groupe DDPF ? Ne serait-il qu’un écran de fumée ? « On nous a dit que c’était l’ultragauche, on nous a dit que c’était le narco, ou pourquoi pas une manipulation étrangère : qui organise tout ça, ce n’est pas pour nous la priorité », estime le syndicaliste Wilfried Fonck. Interrogé ce mercredi par « CNews », le garde des Sceaux Gérald Darmaninn semble privilégier de son côté la piste du narcobanditisme, plus que celle de l’ultragauche, même si le parquet assure ne privilégier aucune piste de son côté. « Je n’exclus rien, dit le ministre, mais quand on tire à la kalachnikov contre des centres pénitentiaires, c’est plutôt un mode opératoire de jeunes délinquants payés quelques milliers d’euros pour faire ce genre de choses, analyse le ministre. Et les réseaux sociaux créent ce genre de moments mimétiques qui visent, sur tous les points du territoire, à faire reculer l’Etat, que les agents pénitentiaires prennent peur… » « Nous ne sommes pas des terroristes » se défend le groupe Selon Gérald Darmanin, sa décision de créer des prisons de haute sécurité pour les narcotrafiquants les plus dangereux serait le déclencheur de cette vague. « C’est la première fois que l’Etat français prend des mesures à ce point fermes, à ce point dangereuses pour leur trafic, qu’ils [les narcotrafiquants] en sont à prendre ce genre d’initiatives. » Le ministre estime aussi prendre des « mesures contre le laxisme qui existait peut-être jusqu’à présent dans les prisons, s’avance-t-il encore, ce qui a mené des réseaux de drogue à pouvoir continuer depuis des cellules carcérales », ainsi qu’à des évasions, « comme M.Amra, en faisant assassiner deux agents pénitentiaires à la kalachnikov. » Alors que le Parquet national antiterroriste (Pnat) a annoncé mardi se saisir de l’enquête, le groupe DDPF a publié un message « pour remettre les choses au clair ». « M.Darmanin pense à surfer sur la vague pour faire entendre ce qu’il a envie aux médias [sic]. Sachez que nous ne sommes pas des terroristes […] La guerre, c’est vous, Darmanin, qui l’avez déclenchée, nous, on veut juste que les droits de l'homme soient respectés. » Toujours sur « CNews », Gérald Darmanin a prévenu : « On ne va pas reculer. » Et de promettre que les enquêteurs « trouveront ces personnes ».