On a vu Silence, l’expo de la Cité des sciences qui se visite avec un casque sur la tête

Lecture Zen Résumer l'article L’exposition Silence prend place à la Cité des sciences et de l’industrie jusqu’au 31 août 2025. Numerama s’y est plongé, dans un bain de silence… ou presque. L’exposition invite à réfléchir à ce thème inattendu. Le silence… De quoi s’agit-il exactement ? Avez-vous déjà essayé de le définir ? Souvent déterminé comme l’absence de bruit, le silence total n’existe pourtant pas, hormis dans l’espace. « Vous allez remarquer que pour une exposition sur le silence, c’est très bavard », commente Mark Read auprès de Numerama. Chargé des projets muséographiques à la Cité des sciences, Mark Read est commissaire de l’exposition Silence. Ouverte depuis le 10 décembre 2024, cette exposition conçue à l’origine par le Musée de la communication de Berne est maintenant adapté pour la Cité des sciences de Paris, jusqu’au 31 août 2025. Son but est d’interroger ce qu’est concrètement le silence, et les formes qu’il peut prendre. Espace dédié à l’histoire de l’ermite américain Christopher Knight. // Source : Diane Hassoun Mais, quel rapport avec la science ? Silence s’inscrit dans la volonté de la Cité des sciences de rapprocher l’art et la science en abordant des thèmes qui ne sont pas, à première vue, scientifiques ou techniques. « Souvent, quand on pense aux sciences et à la Cité des sciences, la première chose qui nous vient à l’esprit, ce sont les sciences dures. Mais, ici, on n’est pas un musée, on ne présente pas d’objet, donc on peut aussi s’attarder sur un autre type de sciences qui sont les sciences sociales. » Avec cette exposition, on explore ainsi plutôt l’aspect psychologique et social du silence. Et, bien que le silence en lui-même ne soit pas de l’art à proprement parler, « l’intérieur de l’exposition ressemble à une galerie d’art », explique Mark Read. « L’exposition est très esthétique : le visuel guide le visiteur et l’immersion se fait beaucoup plus à l’intérieur de nous-même. Et, c’est aussi dans ce sens-là que ça se rapproche de l’art ; car comme dans une exposition artistique, on se demande : ‘qu’est-ce que je sens ?’ ». Immersion dans le silence… avec un casque sur la tête À la question : « Quelle est la ligne directrice de cette exposition ? », Mark Read répond qu’il s’agit d’interroger notre rapport au silence et au bruit. « Elle permet de réfléchir sur des sujets auxquels on ne pense pas forcément. D’offrir un autre regard. Et, c’est un des buts de la Cité : poser un autre regard sur les sujets abordés. » L’exposition se parcourt un casque audio sur la tête. Ici, pas de texte, une voix se déclenche en fonction de notre position dans la salle grâce à des capteurs de position situés dans le plafond. On déambule comme on le souhaite parmi les différents spots qui explorent, chacun, un versant du silence. Le premier guide est visuel, comme l’explique le commissaire de l’exposition. D’un côté de la pièce, les traits courbes représentent le silence et de l’autre, les traits rigides évoquent le phénomène du bruit. Les traits rigides symbolisent le bruit. // Source : Diane Hassoun Selon les espaces, il y a des anecdotes, des faits scientifiques, des histoires et des expériences. Pour n’en citer que quelques-uns, afin de ne pas gâcher la surprise : Une chambre anéchoïque, aussi appelé chambre sourde, supposé être l’endroit le plus silencieux du monde, avec quasiment 99,9 % du son ayant été absorbé. Une expérience sonore mettant en évidence les bruits quotidiens de la place d’un village le jour et la nuit. L’histoire de Christopher Knights, un ermite américain qui a passé 27 ans seul, en silence, en forêt. L’histoire de Sarah Maitland, une écrivaine écossaise qui s’est isolée pendant 40 jours et 40 nuits sur une île déserte pour faire l’expérience du silence prolongé. En ont été tirés deux ouvrages, qui racontent les effets d’un tel silence sur l’être humain et sur sa conscience. Une réflexion philosophique sur le silence et la méditation. Au milieu de tous ces espaces, des poufs permettent de s’asseoir, mais ils ont aussi un autre but : « C’est aussi pour se poser la question : pour moi, c’est quoi le silence ? Est-ce que je pourrai le faire ? », explique Mark Read en faisant référence aux différentes histoires contées. L’exposition Silence, avec des poufs au milieu de la pièce. // Source : Diane Hassoun Dans l’espace représentant la place d’un village, pendant le jour et la nuit, les deux univers ne sont séparés que par une simple ligne. Il suffit d’un pas pour passer de l’un à l’autre. Le jour est marqué par des vrombissements de moteur, le bruit de conversation et le son des cloches, des pas et de quelques animaux. La nuit est beaucoup plus calme, les seuls bruits étant ceux du vent et du bruissement des feuilles. L’espace sonore de la place du village. // Source : Diane Hassoun Sur place, les visiteurs semblent intrigués. Il y a notamment ce père et ce fils, curieux de bien entendre la différence entre le jour et la nuit sur la place du village, qui s’amusent à échanger de place simultanément, plusieurs fois de suite. Il y a aussi un jeune adolescent qui reste longtemps dans la chambre anéchoïque, dans le silence donc, là où d’autres en sortent rapidement, dérangés par cette absence quasi-totale de bruit. Notre propre test de la chambre anéchoïque ne s’est malheureusement pas révélé fructueux. Il faut dire que, juste derrière l’expérience, se trouvait un groupe scolaire de jeunes enfants pour le moins… bruyants. Pour le reste, les spots consacrés à la nature sont extrêmement relaxants. Les histoires de Christopher Knight, l’ermite américain, et Sarah Maitland, écrivaine écossaise, invitent à une véritable réflexion. Le récit de l’écrivaine est particulièrement vivant, invitant à se questionner sur ce que le silence fait ressortir en nous, et sur les émotions qui pourraient nous traverser. Mark Read raconte d’ailleurs que l’écrivaine, dans son témoignage, « explique que, le silence, c’est une perte de soi, mais c’est aussi une manière de se recentrer sur son intérieur ». Espace dédiée à l’histoire de l’écrivaine écossaise Sarah Maitland. // Source : Diane Hassoun Pour ma part, je pense que je ne m’étais jamais rendue compte de l’impact du bruit et du silence sur nos vies. Pourtant, inconsciemment, j’ai tendance à rechercher des lieux calmes quand j’ai besoin de me détendre. À travers cette expérience, la Cité des sciences fait réfléchir et invite à porter un autre regard sur un sujet pour le moins original. « Échapper au bruit numérique » Au-delà de ses effets de surprise, cette exposition questionne aussi le thème du silence plus largement, à travers son rôle dans notre société. « Le silence est de plus en plus recherché, mais il y a une incompréhension parce que ce que l’on cherche, c’est le calme, c’est s’échapper du bruit physique ou mental quasi permanent. Cela comprend même le ‘bruit’ numérique, donc quand on reçoit des notifications — on dit bien qu’on coupe et qu’on fait des pauses du numérique, développe le commissaire de l’exposition auprès de Numerama. Un des buts de l’expo, c’est de ne pas rechercher à remplir le silence mental — tout le monde y réagit différemment, à ce silence. Il s’agit donc de s’interroger : quel est notre rapport avec le silence ? Comment est-ce que l’on vit le silence ? » La chambre sourde. // Source : Diane Hassoun On le sait, le vrai silence, l’absence totale de bruit, existe uniquement dans l’espace. Pour Mark Read, ici sur Terre, « ce qui est considéré comme le silence, c’est l’absence de mot. Cela équivaut souvent à se taire ». Le silence a des vertus et il est même parfois décrit comme étant « guérisseur », un autre aspect expliqué dans une partie de l’exposition. « Pour moi, qui vient de la campagne, la ville peut être un peu ‘too much’ par moments », confie Mark Read. « Plus qu’un pouvoir ‘guérisseur’, pour moi, le silence, c’est un endroit pour se ‘ressourcer’. C’est être à l’extérieur, seul dans la nature, seul avec mes propres pensées et ne pas être sollicité ni demandé, même par message. » Finalement, toute la question de l’exposition tient dans cette réponse. Il s’agit de se demander quelle est notre propre définition du silence, comment nous le vivons et ce que nous y trouvons pour nous-même. L’exposition Silence de la Cité des sciences, en pratique L’exposition Silence se tient à la Cité des sciences et de l’industrie, à Paris. Elle y sera présente jusqu’au 31 août 2025. Le billet d’entrée coûte 15 euros au tarif plein et permet l’accès aux expositions permanentes et temporaires. Pour les étudiants et enfants, le billet sera à 12 euros (il peut être gratuit sous certaines conditions). Cet article existe grâce à Numerama+ Les abonnés Numerama+ offrent les ressources nécessaires à la production d’une information de qualité et permettent à Numerama de rester gratuit. Zéro publicité, fonctions avancées de lecture, articles résumés par l’I.A, contenus exclusifs et plus encore. Découvrez les nombreux avantages de Numerama+. S'abonner à Numerama+ Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci Il y a une bonne raison de ne pas s'abonner à Numerama+ Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information. C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous. 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