Le Pape François nous a quitté le lundi de Pâques 21 avril 2025, mort d’un AVC, qui s’est ensuivi d’un coma et d’une défaillance cardio-circulatoire. Lorsqu’un pape meurt ou démissionne, des cardinaux électeurs se réunissent dans la chapelle Sixtine, au Vatican, pour voter à huis clos jusqu’à élire un nouveau souverain pontife à la majorité des deux tiers. Un système en place depuis le XIIIᵉ siècle, officialisé en 1274 par le pape Grégoire X au Concile de Lyon. Même pour les experts en théologie les plus aguerris, prédire avec certitude qui sera le prochain pape est quasiment impossible : c’est un processus fermé, spirituel, politique, échappant à toute logique rationnelle. Chez Presse-citron, nous avons eu l’idée de soumettre la question à trois agents conversationnels réputés – ChatGPT-4o , Claude 3.7 et Gemini – afin de leur demander leurs prédictions. Pour cela, nous avons mis en place une méthodologie précise, afin que chaque modèle puisse exploiter sa puissance au maximum. Chacun d’entre eux a été interrogé sans contexte préalable, et la première réponse donnée est celle que nous vous donnerons, synthétisée sous forme de tableau. La question leur sera posé deux fois. Une sous la forme de ce prompt généraliste : « Qui pourrait être le prochain pape si François démissionnait ou décédait prochainement ? Donne une analyse argumentée en t’appuyant sur des faits connus, les dynamiques internes du Vatican et les profils en présence, donne les proportion en % de chance pour chaque Pape ». L’autre sous la forme d’un prompt adapté aux spécificités techniques de chaque modèle, voici ce qu’il en est ressorti. ChatGPT prédit une succession dans l’esprit de François Interrogé avec le prompt de base, ChatGPT nous a répondu tout en précisant « qu’il s’agit d’une analyse spéculative, bien qu’appuyée sur des tendances concrètes ». Voici le tableau récapitulatif de sa réponse : Nom du cardinal Chances estimées Arguments en faveur Arguments défavorables Matteo Zuppi (Italie) 30 % Centré sur l’écoute, très proche de François Apprécié comme figure de compromis Italien : retour aux sources Trop proche de François pour les conservateurs Inquiétude sur sa capacité à imposer une autorité Luis Antonio Tagle (Philippines) 18 % Charismatique, très populaire Originaire d’Asie, symbole du Sud global Successeur naturel de François Perçu comme trop doux Peu expérimenté pour gouverner la Curie Moins de cardinaux asiatiques Péter Erdő (Hongrie) 15 % Solide intellectuel, respecté même par les progressistes Expérience curiale Proche des conservateurs Originaire d’un pays politiquement controversé (Orban) Moins pastoral Jean-Claude Hollerich (Luxembourg) 12 % Porte-parole de la synodalité Européen engagé dans la réforme En phase avec François Jugé trop réformateur (célibat, homosexualité) Clivant au sein du Collège Pierbattista Pizzaballa (Jérusalem) 10 % Expérience unique au Moyen-Orient Figure courageuse, franciscain Sens du dialogue interreligieux Peu connu à Rome Manque de poids dans les cercles d’influence curiale Autres (outsiders cumulés) 15 % Diversité possible (Amérique latine, Afrique, USA) Profils comme Sarah, Scherer, Gregory offrent des équilibres Trop clivants (Sarah), ou trop âgés (Schönborn) Manque de soutien parmi les électeurs actuels Ce serait donc Matteo Zuppi, archevêque de Bologne, qui passerait devant les autres papabili (cardinaux qui sont considérés, par les observateurs, les journalistes et les experts du Vatican, comme ayant les qualités requises et potentiellement le soutien nécessaire au sein du Collège des cardinaux pour être élus pape lors d’un conclave). Voyons l’avis que ChatGPT nous donnerait avec un prompt un peu plus travaillé (voir image ci-dessous). Quelles différences peut-on y voir (outre la présentation) ? Que sa première prédiction reflète une ligne de continuité pastorale et réformiste dans l’esprit de François, tandis que la seconde élargit le spectre en intégrant des candidats à l’ancrage doctrinal plus conservateur ou à la gouvernance plus traditionnelle. Nom / Origine Probabilité Forces principales Limites perçues Matteo Zuppi (Italie, 69 ans) 25 % • Archevêque de Bologne, président de la Conférence épiscopale italienne. • Réformiste modéré, apprécié pour sa proximité avec les pauvres et sa capacité au dialogue. • Proche de l’esprit pastoral de François sans être clivant. • Trop aligné à François pour une partie du collège. • Moins d’expérience diplomatique à l’échelle internationale. Pietro Parolin (Italie, 70 ans) 20–25 % • Secrétaire d’État, numéro deux du Vatican. • Figure clé de la diplomatie vaticane, homme de continuité institutionnelle. • Respecté dans les cercles curiaux. • Peu de contact avec la réalité pastorale quotidienne. • Profil perçu comme technocratique par certains cardinaux. Luis Antonio Tagle (Philippines, 67 ans) 20–25 % • Pro-préfet pour l’Évangélisation. • Très populaire, charismatique, porteur du renouveau pastoral du Sud global. • Voix symbolique d’une Église moins eurocentrée. • Bloc asiatique encore numériquement faible. • Image de “François d’Asie” pouvant diviser les conservateurs. Péter Erdő (Hongrie, 72 ans) 10–15 % • Archevêque de Budapest, juriste canoniste respecté. • Profil doctrinal solide, rassurant pour les conservateurs sans être radical. • Forte stature intellectuelle en Europe centrale. • Moins influent dans les zones en croissance de l’Église. • Proximité supposée avec la ligne politique d’Orban. Fridolin Ambongo (RDC, 65 ans) 5–10 % • Archevêque de Kinshasa, très engagé sur les questions sociales et politiques. • Incarnation d’un catholicisme africain en plein essor. • Possède un profil respecté dans le Sud global. • Moins connu dans les cercles curiaux. • Manque d’appui structuré au-delà du continent africain. D’un point de vue technique, il est tout à fait normal que la réponse diffère, car le cadre méthodologique appliqué diffère aussi. Le premier repose sur une analyse journalistique synthétique et grand public, l’autre sur une modélisation géopolitique systémique croisant des variables OSINT, ce qui élargit et diversifie nécessairement les profils retenus. Dans les deux cas, c’est Matteo Zuppi qui est retenu. Gemini parie sur l’Italie… mais reste (très) prudent Passons à Gemini (version 2.5 Flash), le poulain de Google. Comme vous le verrez, la réponse est radicalement différente, même avec le prompt non affiné. Ici, c’est le Cardinal Pietro Parolin qui remporte la mise, même s’il reste dans la même tranche de pourcentage de réussite que les préditions de ChatGPT. Zuppi est, en revanche, très loin derrière, avec seulement 10 à 15 % de chances de succéder à François. Nom / Origine Probabilité estimée Avantages stratégiques (OSINT) Limites potentielles Card. Pietro Parolin (Italie, 70 ans) 20–30 % • Secrétaire d’État : autorité diplomatique centrale • Figure modérée, continuité de gouvernance • Solide réseau curial • Faible expérience pastorale directe • Moins incarné comme figure spirituelle Card. Luis Antonio Tagle (Philippines, 67 ans) 20–30 % • Charismatique, apprécié dans le Sud global • Proche de François et de la ligne d’évangélisation • Excellent communicateur • Faible poids électoral asiatique • Perçu comme un « François bis » Card. Péter Erdő (Hongrie, 72 ans) 10–15 % • Canoniste reconnu, stature intellectuelle forte • Représente une ligne doctrinale ferme sans radicalité • Bonne lisibilité en Europe • Profil conservateur clivant pour les réformistes • Proximité indirecte avec l’image d’Orban Card. Matteo Zuppi (Italie, 69 ans) 10–15 % • Fort ancrage pastoral, président de la Conférence épiscopale italienne • Réformiste pragmatique, figure de dialogue • Apprécié pour son action sociale • Trop aligné avec François pour les opposants • Moins expérimenté diplomatiquement Card. Fridolin Ambongo (RDC, 65 ans) 5–10 % • Voix forte de l’Afrique, ancrage dans les réalités sociales • Soutien possible d’un bloc africain croissant • Équilibre doctrinal possible • Moins connu à Rome • Risque de marginalisation curiale • Peut apparaître clivant selon les axes géographiques Passons à un niveau supérieur d’analyse avec un prompt spécialement concocté et affiné pour convenir à Gemini (voir image ci-dessous). Grande surprise : avec ce prompt, Gemini ne souhaite tout simplement pas répondre en arguant « Je comprends votre demande d’obtenir ces prédictions. Cependant, je dois réaffirmer que, conformément aux instructions de n’utiliser que des informations publiques et vérifiables et d’éviter toute spéculation non fondée, il m’est impossible de fournir de tels pourcentages pour l’élection d’un pape. Attribuer un pourcentage serait de la pure spéculation et ne respecterait pas la contrainte fondamentale de cette requête ». Gemini s’est simplement contenté d’énoncer une liste des candidats tout à fait classique. Programmé pour respecter des règles strictes de prudence algorithmique, il ne peut générer des prédictions chiffrées lorsqu’aucune donnée empirique solide ne peut les justifier, notamment dans des contextes sensibles comme une élection pontificale, où la spéculation serait considérée comme une prise de position infondée. Pourquoi a-t-il répondu dans le cas du prompt « simple » ? On pourrait spéculer et postulant que, lorsque le prompt est formulé de manière plus ouverte et moins pressante, Gemini peut contourner ses propres règles. Même si cela revient à déguiser une prédiction en projection raisonnée ; c’est potentiellement un contournement toléré par son système de filtrage. Claude : un conclave à la croisée des blocs doctrinaux Passons désormais à Claude 3.7, dernière merveille d’Anthropic. Si l’on en croit ses prédictions avec le prompt basique, voici comment Claude voit la situation. Nom / Origine Âge Fonction / Profil Forces principales Faiblesses / Points de vigilance Estimation Luis Antonio Tagle (Philippines) 67 ans Préfet du Dicastère pour l’Évangélisation • Charismatique • Fort ancrage pastoral • Voix du Sud global • Proche de François • Peu de poids électoral asiatique • Perçu comme “François II” 25 % Pietro Parolin (Italie) 70 ans Cardinal Secrétaire d’État • Diplomat expérimenté • Profil modéré • Fort réseau curial • Consensus possible • Faible expérience pastorale • Image de gestionnaire 20 % Matteo Zuppi (Italie) 69 ans Archevêque de Bologne, président CEI • Réformiste social • Pasteur de terrain • Apprécié pour sa capacité de dialogue • Moins expérimenté à l’international • Trop lié à François pour certains 15 % Robert Sarah (Guinée) 79 ans Ancien préfet du Culte Divin • Figure forte des conservateurs • Profil spirituel rigoureux • Pape africain potentiel • Très clivant • Âge avancé • Rupture avec la ligne François 10 % Christoph Schönborn (Autriche) 79 ans Archevêque de Vienne, théologien • Réputé intellectuel • Équilibre tradition / ouverture • Proximité avec Benoît XVI • Âge élevé • Moins actif dans la gouvernance actuelle 10 % Peter Turkson (Ghana) 76 ans Ancien préfet pour le Développement humain intégral • Profil africain modéré • Expérience curiale • Bon communicateur • Moins visible actuellement • Influence diminuée 5 % Marc Ouellet (Canada) 80 ans Ancien préfet des évêques • Conservateur modéré • Expérience internationale • Solide formation théologique • Très âgé • Moins actif et influent depuis 2023 5 % Óscar Rodríguez Maradiaga (Honduras) 81 ans Proche conseiller de François • Voix du Sud • Connu pour ses engagements sociaux • Âge très avancé • Réputation entachée 3 % Sean O’Malley (États-Unis) 80 ans Archevêque de Boston, franciscain • Bonne image sur les abus sexuels • Figure de réforme éthique • Âge • Moins influent sur la scène globale 3 % Jean-Claude Hollerich (Luxembourg) 66 ans Rapporteur du Synode, jésuite • Réformiste actif • Porte une vision synodale ouverte • Clivant pour les conservateurs • Position parfois controversée 4 % C’est donc Tagle qui passe devant les autres avec 25 % de chance, Parolin en second (20 %) et Zuppi (15 %). Il est très intéressant de voir que Claude, au lieu de catégoriser certains comme outsiders, a préféré les nommer directement. Passons au prompt affiné, que vous pouvez voir sur l’image ci-dessous. Avec ce prompt plus fourni, Claude nous a formulé cette réponse : Nom / Origine Âge Fonction Probabilité Forces principales Limites Luis Antonio Tagle (Philippines) 67 ans Préfet de l’Évangélisation 18,5 % (14–23 %) • Charismatique, bon communicateur • Soutien du Sud global • Aligné avec François • Faible poids électoral asiatique Matteo Zuppi (Italie) 69 ans Président de la CEI 14,2 % (10–18 %) • Pasteur apprécié • Dialogue inter-blocs • Sensibilité sociale • Peu d’envergure curiale Pietro Parolin (Italie) 70 ans Secrétaire d’État du Vatican 12,8 % (9–16 %) • Expérience diplomatique • Profil de continuité • Trop lié à la Curie, manque de souffle pastoral Christoph Schönborn (Autriche) 79 ans Archevêque de Vienne 9,5 % (7–12 %) • Théologien reconnu • Équilibre doctrinal • Âge avancé Jean-Claude Hollerich (Luxembourg) 66 ans Rapporteur du Synode 8,6 % (6–11 %) • Réformiste actif • Expérience internationale • Clivant pour les conservateurs Peter Turkson (Ghana) 76 ans Ancien préfet curial 7,4 % (5–10 %) • Figure africaine modérée • Voix du Sud global • Moins visible actuellement Robert Sarah (Guinée) 79 ans Ancien préfet du Culte Divin 5,8 % (4–8 %) • Porte-voix des conservateurs • Doctrine forte • Clivant, âge élevé Óscar Maradiaga (Honduras) 81 ans Ancien coordinateur du Conseil des cardinaux 5,2 % (3–7 %) • Réformiste latino-américain • Proche de François • Âge très avancé, controverses passées Marc Ouellet (Canada) 80 ans Ancien préfet des évêques 4,8 % (3–7 %) • Conservateur modéré • Expérience globale • Retiré, peu actif Mario Grech (Malte) 67 ans Secrétaire général du Synode 4,2 % (2–6 %) • Profil consensuel • Pilier du processus synodal • Moins connu, manque de charisme Le trio de tête ne change pas, mais ce qui est intéressant de voir ici, c’est que le tableau repose sur des valeurs chiffrées précises avec intervalles de confiance. Une approche que l’on pourrait qualifier de plus quantifiée, structurée et fondée sur une logique probabiliste explicite. Bien évidemment, cette petite expérimentation n’a nullement vocation de prédire avec certitude l’identité du prochain Pape. Nous souhaitions plutôt démontrer comment l’IA, lorsqu’elle est alimentée par des données ouvertes et structurées, peut reproduire, mimer des raisonnements d’experts. En identifiant les profils pertinents, elle évalue leur probabilité en fonction de variables géopolitiques, doctrinales et institutionnelles, et propose ainsi des scénarios/prédictions argumentés. Cependant, n’oublions surtout pas que ces systèmes d’IA, si puissants soient-ils, peuvent se tromper lamentablement. D’un point de vue structurel, ils sont incapables d’anticiper les dynamiques humaines et spirituelles, encore plus lorsqu’il s’agit d’un choix que seul le conclave peut décider. Rendez-vous donc autour du 11 mai pour voir quel modèle aura été le plus proche de la réalité ! ChatGPT met en avant une succession dans l’esprit de François, avec Zuppi et Tagle en tête. Claude propose une approche structurée et probabiliste, avec des intervalles de confiance, plaçant Tagle comme favori devant Parolin et Zuppi. Gemini reste très prudent : il liste les candidats sans attribuer de pourcentages avec le prompt le plus élaboré. 📍 Pour ne manquer aucune actualité de Presse-citron, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.