Le riz est une céréale cultivée dans des environnements souvent inondés, a une capacité plus élevée que d’autres cultures à absorber les éléments présents dans le sol et l’eau. Tout ce que le sol lui propose, il s’en nourrit – y compris ce qu’il vaudrait mieux éviter. L’arsenic fait partie de ces composés, un solide cristallin très toxique pour l’homme. Lorsque vous mangez du riz, vous avalez aussi ce métalloïde, naturellement présent dans l’environnement : un problème connu depuis longtemps. Ce qu’on ignorait, c’est à quel point le réchauffement climatique allait aggraver ce phénomène. Cette étude publiée le 16 avril dans la revue The Lancet Planetary Health vient de mettre le doigt sur ce problème. Un peu plus d’arsenic dans votre bol de riz ? L’étude a été menée durant six ans, par des chercheurs américains et chinois. Six années pendant lesquelles ils se sont attelés à cultiver différentes variétés de riz dans des conditions simulant notre avenir proche : davantage de dioxyde de carbone dans l’air, des températures plus élevées. Résultat : les taux d’arsenic augmentent drastiquement. L’arsenic existe sous plusieurs formes. Celle qui inquiète ici, c’est l’arsenic dit inorganique, qui ne vient pas directement de la terre ou des aliments naturels, mais des infiltrations industrielles et des polluants présents dans l’eau utilisée pour irriguer les rizières. C’est cette forme-là que le riz absorbe de manière plus importante lorsque les températures montent et que l’air se charge en dioxyde de carbone : deux effets directs du réchauffement climatique. C’est aussi à cette forme que la recherche relie à des pathologies graves : cancers de la peau, des poumons, de la vessie, maladies cardiovasculaires, troubles du développement chez les nourrissons. Plus les conditions climatiques se détérioreront, plus le riz absorbera ce type d’arsenic, sans forcément laisser de traces immédiates. Il s’installe dans l’organisme et agit lentement, parfois pendant des années, avant de se déclarer ; en toxicologie, on parle alors de toxicité chronique, à l’inverse de la toxicité aiguë. « On se doutait que la température en soi pouvait augmenter les niveaux [d’arsenic], et le dioxyde de carbone un peu à la marge. Mais le mélange des deux, c’était une vraie claque, on ne s’y attendait absolument pas. Imaginez : une culture consommée quotidiennement par un milliard de personnes, le moindre changement dans sa toxicité aura des répercussions monstrueuses », explique Lewis Ziska, chercheur à la Columbia University. Depuis 30 ans, ce physiologiste végétal étudie le riz, mais s’est intéressé plus récemment aux effets du changement climatique sur les cultures, notamment leur teneur en nutriments. Dans sept pays d’Asie ; Chine, Inde, Vietnam, Bangladesh, Philippines, Indonésie, Myanmar ; la toxicité augmente de cette céréale augmente progressivement. Pour les populations les plus pauvres de ces régions, le riz est souvent l’aliment le plus abordable et le plus disponible : elles seront donc plus susceptibles d’être exposées à ce riz contaminé. Ces sept pays, à eux seuls, sont peuplés par environ 3,6 milliards de personnes, soit près de 44 % de la population mondiale. Les chercheurs mettent alors trois solutions sur la table : la régulation grâce aux politiques publiques, la sélection de nouvelles variétés moins absorbante et l’éducation alimentaire. Une table bancale, car n’oublions pas que ces solutions, aussi raisonnables soient-elles sur le papier, se heurtent à une réalité qui ne l’est pas. La régulation ? Essentielle, mais trop lente, trop timide, et généralement absente là où elle est la plus urgente. La sélection variétale ? Prometteuse, mais le processus est chronophage, très coûteux et exige des infrastructures, et un déploiement mondial dans des zones parfois privées de l’essentiel. Et l’éducation alimentaire ? Louable, mais tragiquement insuffisante face à la dureté du choix entre « manger du riz toxique » ou « ne rien manger du tout ». Une étude récente a montré que les conditions climatiques aggravent la contamination du riz par l’arsenic. Cette évolution touche particulièrement les régions où cette céréale constitue la base de l’alimentation quotidienne. Les solutions envisagées existent, mais leur mise en œuvre se heurte à des obstacles techniques, économiques et sociaux considérables. 📍 Pour ne manquer aucune actualité de Presse-citron, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.