Est-ce un tournant concret ou l’énième épisode d’une des plus longues arlésiennes de la Ve République ? François Bayrou, constant défenseur de la proportionnelle, et qui en avait fait une condition de son ralliement à Emmanuel Macron en 2017, semble vouloir avancer sur la réforme du mode de scrutin électoral pour les législatives. Dans une interview au Journal du dimanche, son ministre des Relations avec le Parlement Patrick Mignola (MoDem) a annoncé que le Premier ministre allait engager dès la fin du mois d’avril une «consultation» avec les partis et les groupes parlementaires sur le sujet. «Le Premier ministre souhaite aller vers la proportionnelle aux législatives. A la rentrée du 28 avril, il engagera une consultation de tous les partis, avec les groupes parlementaires», a déclaré le vice-président du Modem dans un entretien au journal détenu par le milliardaire d’extrême droite Vincent Bolloré. «Tout le monde ou presque est d’accord sur le principe : il faut plus de proportionnelle. Reste à déterminer la forme : régionale ? Départementale ? Mixte ? Nous aurons ce débat», ajoute ce proche de François Bayrou, qui laisse entendre que cette réforme pourrait être examinée à l’automne. Départemental ? Mixte ? Intégral ? Sur le principe, la proportionnelle compte plusieurs appuis. La présidente de l’Assemblée Yaël Braun-Pivet est favorable à la proportionnelle dans les départements comptant au moins onze députés. Avant d’accéder à Matignon, François Bayrou penchait, lui, pour une proportionnelle dans l’ensemble des départements. Le Béarnais a souvent varié dans ses modalités d’application : en 2021, le Modem a défendu deux réformes, une proportionnelle intégrale au niveau départemental, pour les listes ayant obtenu au moins 5 % des voix ; une autre appliquée aux départements élisant douze députés. Lors de son discours de politique générale, il inclinait pour une proportionnelle «inscrite dans les territoires». Un sujet qui divise ou rassemble au-delà des partis De nombreux partis, notamment à gauche, souhaitent une évolution du mode de scrutin. LFI a ainsi déposé en avril 2024 une proposition de loi pour un retour au mode de scrutin de 1986, avec une proportionnelle intégrale au niveau départemental. Les Ecologistes ont fait adopter au Sénat une résolution symbolique, sans trancher sur le mode de scrutin, pour une bascule vers la proportionnelle. Le Parti socialiste part divisé, comme Renaissance. A droite, Les Républicains (LR), qui grâce au scrutin majoritaire à deux tours ont pu conserver bon nombre de circonscriptions malgré une érosion de leur socle électoral, ainsi que le parti Horizons, y sont opposés.