Jeudi 17 avril, 13h20, parking du parc des expositions à Nantes. Une file d’attente composée majoritairement de familles avec enfants s’étend sur plusieurs centaines de mètres. Ce public s’apprête à pénétrer à l’intérieur du chapiteau du cirque Pinder, installé au bord de l’Erdre depuis le 12 avril dernier. « On est quasiment complet à chaque représentation, c’est une excellente nouvelle pour le retour du cirque Pinder », confie Corentin Collin, le jeune monsieur Loyal âgé de 25 ans, quelques minutes avant la séance. En tout, 41. 000 spectateurs se sont déplacés aux 26 spectacles donnés par la troupe circassienne dans la cité des Ducs. Après plusieurs années d’absence, le cirque Pinder refait son apparition dans l’Hexagone avec une tournée sans animaux dans une soixantaine de villes en 2025. Créée en 1854 au Royaume Uni avant de s’implanter en France au début du XXe siècle, la troupe circassienne a connu plusieurs propriétaires dont Gilbert Edelstein qui avec l’aide de son épouse, Andrée, a contribué au mitan des années 80 à relancer une compagnie alors en déclin. Mais dans les années 2010, le cirque est confronté à une importante baisse de fréquentation du public. En trois ans, le nombre de billets vendus était passé de 450.000 à 100.000. Parmi les principales causes de cette perte d’attractivité : la crise économique et les critiques contre les mauvais traitements des animaux sauvages. Le 2 mai 2018, la société exploitant la marque est placée en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Créteil. Rideau pour le cirque Pinder. « C’est un cirque qui traverse les âges » Touché par une maladie, Gilbert Edelstein décède en 2022. Une page se tourne mais une autre s’ouvre avec son épouse et son petit-fils Alexandre (25 ans) qui ont repris les manettes avec l’ambition de restructurer l’entreprise et de repartir en tournée. « C’est un cirque qui traverse les âges et qui à chaque difficulté parvient à s’en relever », résume Alexandre Edelstein. Plus de 40 000 spectateurs se sont déplacés au cirque Pinder installé pendant 15 jours sur le parking du parc des expositions de la Beaujoire, à Nantes. - A.Flepp/20Minutes Fraîchement diplômé d’une école commerce, le jeune homme s’est associé avec Xavier Martin, fondateur en 2016 du cirque de Noël à Toulouse, un événement qui accueille plus de 100 000 spectateurs chaque année. Un choix loin d’être un hasard. Natif de Rouen, Xavier Martin grandit à Nantes et passe la plupart de ses grandes vacances à Quiberon (Morbihan) chez ses grands-parents. C’est de là qu’est né son amour du cirque. « Pinder s’installait tous les étés près de notre appartement et j’étais émerveillé d’observer le chapiteau se monter et se démonter, se remémore Xavier Martin. J’avais déjà mes tickets et mes affiches Pinder dès l’âge de 2 ans ». En 2024, il reçoit un coup de téléphone d’Alexandre Edelstein qui le convainc de rejoindre la compagnie et de relancer le cirque. « Nous avons dû tout racheter de A à Z, rappelle Xavier Martin. On a investi 1,5 million d’euros dans l’achat de 26 semi-remorques, d’un chapiteau de 1600 places individuelles et du matériel technique ». La compagnie emploi plus de 70 personnes dont une quinzaine d’artistes. Dans son nouveau spectacle d’environ 2h, le cirque Pinder revisite avec humour et modernité les grands classiques du cirque en y ajoutant des numéros singuliers comme ce jongleur italien, Victor Saly, capable de jouer de la batterie avec… des balles. Ou ce ventriloque, Kenneth Huesca, qui donne des voix invraisemblables à des personnes choisies dans le public. Une séquence hilarante pour les petits comme pour les grands ! Primés en 2012 au festival de cirque de Monte-Carlo, les brésiliens des Flying Zuniga réussissent, eux, l’une des figures les plus difficiles au trapèze : le triple saut périlleux. Les animaux qui ont contribué à la réputation du cirque Pinder ne sont plus là, la compagnie s’inscrivant dans la loi du 30 novembre 2021 qui interdit progressivement les spectacles avec animaux chez les troupes itinérantes. Le jongleur Victor Saly joue de la batterie avec des balles. - A.Flepp/20Minutes Un changement qui n’a pas ébranlé la force de la marque Pinder, assure Alexandre Edelstein : « Les gens réagissent beaucoup, il y a du rire, de la peur, du sursaut, de la beauté, de la poésie, de la magie et parfois un peu de grotesque. C’est intergénérationnel, chacun y trouve son compte ». Des invitations gratuites distribuées à tour de bras Pour attirer des spectateurs, la compagnie a distribué massivement des invitations gratuites aux entreprises et commerces. A Nantes, 28.000 places ont été offertes en majorité pour des séances du soir, un créneau moins prisé par les amateurs de cirque. « Ce n’est pas une opération totalement blanche car c’est une heure où nos clients consomment à notre buvette une barquette de frite et une boisson, par exemple », concède Xavier Martin. Cette volonté de démocratisation masque quelque peu l’envolée des tarifs d’une place au cirque Pinder que Xavier Martin impute à la hausse des prix de l’énergie et des fournisseurs. Comptez 28 euros pour la place la moins chère (Fauteuil Bronze) qui n’offre pas toujours une vue idéale sur le spectacle. Le cirque Pinder, ici à Nantes, a entamé une tournée d'une soixantaine de villes en France. - A.Flepp/20Minutes Or, en 2017, ces emplacements s’échangeaient au prix de 13 euros, indique une annonce encore en ligne sur le site Lorraineaucoeur.com. Les meilleures places de Pinder ont, elles aussi, augmenté sensiblement de 5 à 6 euros (Fauteuil Or 46 euros, Loges VIP 52 euros), même s’il est relativement facile d’obtenir des réductions via les billetteries des grandes surfaces (Leclerc, Carrefour), rétorque Xavier Martin. Après Nantes, le cirque Pinder s’installera à Saint-Brieuc (25 au 27 avril) avant d’entamer une tournée de villes bretonnes (Vannes, Quimper, Brest…). « On est très content du démarrage et si ça continue le cirque a de très belles années devant lui », se félicite Alexandre Edelstein.