Le 20 janvier dernier, les PDG les plus en vue de la technologie étaient des invités de marque à l’investiture de Donald Trump. Quelque 100 jours plus tard, des patrons de grandes entreprises américaines déchantent. Séduites par les baisses d’impôt et l’élimination de la réglementation promises par leur président, les grandes entreprises américaines sont restées discrètes face au chaos qu’il a généré sur les marchés pendant ses 100 premiers jours au pouvoir. À mesure que sortent leurs résultats trimestriels, les dirigeants des gros canons de l’économie américaine commencent à exprimer publiquement leurs critiques en réponse aux questions des analystes financiers. Voici un aperçu de ce qu’ils ont dit au cours des dernières semaines. Sidéré Le grand patron de BlackRock, président du plus important gestionnaire d’actifs au monde, s’est dit sidéré par l’ampleur de l’offensive tarifaire de Donald Trump « qui va au-delà de tout ce que j’aurais pu imaginer dans les 49 années que j’ai passées dans le secteur financier ». PHOTO JEENAH MOON, ARCHIVES REUTERS Larry Fink, président et chef de la direction de BlackRock Ce n’est pas Wall Street contre les gens ordinaires. La dégringolade du marché a des impacts de plusieurs millions de dollars sur l’épargne des gens ordinaires en vue de la retraite. Larry Fink, président et chef de la direction de BlackRock Un pro-droits de douane PHOTO JENNY KANE, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS Un four Whirlpool chez un détaillant à Gresham, en Oregon Le président et chef de la direction du fabricant d’appareils électroménagers Whirlpool est un des rares chefs d’entreprise américains qui s’affiche ouvertement en faveur des mesures protectionnistes de Donald Trump, qui rendront ses produits plus attrayants pour les consommateurs américains que les marques de ses concurrents moins chères comme LG. « C’est un secteur qui fabrique déjà aux États-Unis, a dit Marc Bitzer. Une fois qu’il y aura de la prévisibilité et de la stabilité, je pense que nous pourrions augmenter nos investissements aux États-Unis. » Gérable Le PDG de Boeing et son chef de la direction financière sont de ceux qui croient que les droits de douane sur les pièces importées pour construire ses avions ne feront pas tant de mal à leur entreprise, parce qu’ils bénéficieront d’une exemption si l’appareil est vendu à l’étranger. PHOTO KEN CEDENO, ARCHIVES REUTERS Kelly Ortberg, président et chef de la direction de Boeing « Si le coût net des droits de douane sur les pièces importées est inférieur à 500 millions US par année, ce serait gérable », a dit son chef de la direction financière, Brian West. Mauvaise approche Le transporteur aérien Delta a réduit ses prévisions de bénéfices pour l’année en cours, alors qu’il s’attendait à connaître la meilleure année de son histoire. « Avec l’incertitude généralisée concernant le commerce mondial, la croissance s’est pratiquement arrêtée, a dit Ed Bastian, président et chef de la direction de Delta. Dans cet environnement, nous protégeons nos marges et nos liquidités en nous concentrant sur ce qu’on peut contrôler. » PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE Ed Bastian, chef de la direction de Delta, en vue de la signature des contrats d’achat de la CS100 de Bombardier en 2016 Des tablettes vides Lors d’une rencontre avec le président des États-Unis, les plus importants détaillants américains Walmart, Target et Home Depot l’ont prévenu en privé que les consommateurs américains pourraient bientôt trouver des tablettes vides si les droits de douane de 145 % contre la Chine sont maintenus. « En ce qui concerne les droits de douane, c’est un coût supplémentaire dans l’équation que nous devons comprendre mutuellement », a dit Richard McPhail, chef de la direction financière de Home Depot. PHOTO BRENDAN MCDERMID, ARCHIVES REUTERS Pour Procter & Gamble, qui fabrique plusieurs produits de consommation courante comme le savon Tide et le papier de toilette Charmin, les droits de douane sont synonymes d’inflation. De l’inflation à venir Pour Procter & Gamble, qui fabrique plusieurs produits de consommation courante comme le savon Tide et le papier de toilette Charmin, les droits de douane sont synonymes d’inflation. Les droits de douane sont intrinsèquement inflationnistes. Jon Moeller, président et directeur général de Procter & Gamble, en annonçant une hausse prochaine du prix de vente de ses produits et une révision à la baisse de la croissance des ventes Mauvais, selon Elon Musk Même le nouveau meilleur ami de Donald Trump affirme publiquement que les droits de douane sont mauvais pour l’économie. PHOTO KEVIN LAMARQUE, ARCHIVES REUTERS Elon Musk Je l’ai dit plusieurs fois publiquement que je crois que des droits de douane bas sont généralement une bonne idée pour la prospérité, mais cette décision revient à celui qui a été élu pour représenter le peuple, le président des États-Unis. Je vais continuer à plaider pour des droits de douane plus bas, mais c’est tout ce que je peux faire. Elon Musk, dans son rôle de directeur général de Tesla, en réponse aux analystes financiers Tort considérable La firme d’investissement JP Morgan a fait une exception à sa traditionnelle discrétion pour critiquer ouvertement l’administration Trump. « Imaginez le dommage causé à la réputation de l’Amérique par ce virage soudain vers des politiques extrêmement protectionnistes, a dit le chef de la stratégie globale de JP Morgan Asset Management, David Kelly. La perte de confiance qui en résulte réduit le prix que les gens sont prêts à payer pour les actifs américains. » Dommages irréparables Le PDG du fonds de couverture Citadel, Ken Griffin, grand supporteur de Donald Trump, est d’avis que le président cause des dommages irréparables. PHOTO JEENAH MOON, ARCHIVESTHE NEW YORK TIMES Ken Griffin, PDG du fonds Citadel Dans les marchés financiers, aucune marque ne se compare à celle des obligations américaines, du marché américain des obligations, du dollar américain, à la valeur et à la crédibilité des obligations américaines. Nous bousillons cette réputation actuellement, nous la mettons à risque et ça peut prendre une vie avant de réparer les dommages qui ont été faits. Ken Griffin, PDG du fonds de couverture Citadel Des alliés mécontents Les entreprises du secteur pétrolier américain devraient en principe se réjouir de l’intention de leur président d’augmenter la production de pétrole et de faire des États-Unis une puissance énergétique mondiale. Ce n’est pas le cas, a constaté la Réserve fédérale de Dallas, qui a réalisé un sondage auprès des dirigeants des principales entreprises pétrolières, dont l’anonymat a été préservé. « Le chaos de l’administration est un désastre pour le marché des commodités. Drill, baby, drill n’est rien de plus qu’un mythe et un slogan populiste. La politique tarifaire rend les prévisions impossibles et n’a pas de but précis. Nous voulons plus de stabilité. » « Je n’ai jamais vécu autant d’incertitude dans notre secteur en plus de 40 ans de carrière. » Propos recueillis par la Réserve fédérale de Dallas Sources : CBS, Yahoo Finance, Axios, The Wall Street Journal, CNN, Bloomberg, Reuters