Violences à l’école : Voici les questions qui seront posées aux élèves internes et qui ont fait des voyages scolaires
«Est-ce que quelqu’un t’a fait du mal pendant ce voyage ? », « Avez-vous subi des violences au sein de l’internat ? »… Comme Élisabeth Borne l’avait annoncé, des élèves internes et qui ont fait des voyages scolaires vont bientôt recevoir des questionnaires les interrogeant sur d’éventuelles violences subies. Le projet de questionnaire, révélé par France Info, doit être discuté lors d’une réunion la semaine prochaine, pour être expérimenté d’abord dans cinq académies, selon nos informations, avant une généralisation à la rentrée. 40 établissements vont être identifiés au sein des académies de Lille, Besançon, Martinique, Limoges et Versailles pour le questionnaire post-voyage, selon Le Parisien, et quatre établissements du second degré (deux publics et deux privés sous-contrat) par académie pour le questionnaire sur les internats. « Avez-vous subi des violences au sein de l’internat ? » Les questions, que 20 Minutes a pu consulter, sont différentes pour le primaire et le secondaire. Pour le primaire, elles ne portent que sur les voyages scolaires (il n’y a qu’une dizaine d’internats à ce niveau-là de la scolarité). Le tutoiement est utilisé. Une première série de questions explore le bien-être de l’enfant à l’école (« Comment te sens-tu dans ton école ? », « Comment te sens-tu avec les autres enfants de l’école ? »). Puis les questions abordent le voyage scolaire en lui-même, en demandant à l’enfant s’il s’est « très bien », « plutôt bien », « plutôt mal » ou « très mal » passé ; si les adultes se sont « bien occupés » de l’enfant, si l’enfant avait « peur », puis plus directement si quelqu’un lui a « fait du mal », a « voulu toucher des parties de son corps » sans qu’il soit « d’accord ». Au collège et au lycée, deux questionnaires distincts s’adressent aux élèves internes d’une part, et aux élèves qui ont effectué des voyages scolaires, d’autre part. Les questionnaires vouvoient les élèves et sont construits de la même manière que le premier degré, avec une première série de questions sur leur sentiment de bien-être au sein de l’établissement scolaire, « l’ambiance entre élèves », les « relations avec les adultes », puis les questions abordent directement le voyage scolaire ou l’internat. Par exemple, le sentiment de « confiance » vis-à-vis des adultes à l’internat, le sentiment de sécurité dans certains lieux, le respect de l’intimité, et enfin, les violences. La question est posée directement : « Avez-vous subi des violences au sein de l’internat ? ». A la fin de chacun des questionnaires sont rappelés les numéros d’appel pour les enfants victimes de violence, comme le 119 (enfance en danger), le 3018 (harcèlement et violences numériques) et enfin le 3114 (numéro de prévention suicide, en cas de mal-être). Les collégiens, collégiennes et lycéens, lycéennes qui le désireraient sont invités à s’adresser à un ou une psychologue de l’Education nationale, assistant de service social ou infirmier de l’établissement ; et les élèves de primaire, à un adulte de confiance à l’école. La question de l’anonymat et des moyens mis en place Si tous les syndicats contactés par 20 Minutes s’accordent sur la nécessité de ces questionnaires, certaines organisations expriment des réserves sur la forme ou sur la façon dont ils seront déployés. Guislaine David, porte-parole du syndicat d’enseignants du 1er degré SNUipp-FSU, juge ainsi que deux questionnaires différents devraient être faits pour les enfants les plus petits en primaire, et pour les plus grands. « Des enfants de 6 ans peuvent dire qu’ils ne se sentent pas bien à l’école s’ils viennent juste de se bagarrer », explique-t-elle, en accord avec sa collègue du Se-Unsa, Marie-Laure Tirelle. Sophie Vénétitay, secrétaire générale du SNES-FSU, regrette l’absence de « réflexion collective sur la démarche », notamment comment introduire ce questionnaire aux élèves. Mais c’est surtout la question de ce qui va être mis en place après réception des réponses qui préoccupe les syndicats. « Comment vont être identifiés les personnels ressource en cas de violence ? Est-ce que les noms et contacts vont être indiqués ? », se demande Marie-Laure Tirelle, qui par ailleurs regrette qu’on ait oublié les internats du premier degré, situés dans les écoles régionales du premier degré. « Comment allons-nous faire pour traiter les dénonciations des élèves, d’autant que les questionnaires sont anonymes ? », complète Pascale Picol, de la CGT-Enseignement Privé (CGT-EP). Même constat du côté de Sophie Vénétitay et de son homologue du primaire, Guislaine David, qui aimerait qu’il soit permis aux enseignants confrontés à de tels témoignages de lever l’anonymat en réinterrogeant tous les élèves, comme c’est déjà le cas pour le questionnaire effectué tous les ans sur le harcèlement. Sébastien Vieille, du Snalc, aimerait quant à lui qu’il y ait « suffisamment de confiance accordée aux équipes quand elles remontent des cas de violence venant d’élèves, que l’institution minimise ». Pour ensuite protéger les enfants, Guislaine David pose la question des moyens déployés. « Quand vous faites une alerte pour un enfant victime de violences sexuelles, que vous refaites une alerte deux semaines plus tard et que rien ne se passe, et que même le procureur vous explique qu’il ne peut pas tout traiter… Nous manquons par ailleurs d’assistants sociaux, d’infirmiers, de psychologues au sein de l’Education nationale. Les moyens de la protection de l’enfance sont insuffisants. C’est toute la chaîne qui doit être réinterrogée ! S’il ne se passe rien quand les enfants signalent, cela les mettra encore plus en difficultés », s’insurge la porte-parole du SNUipp-FSU.