Paris-Roubaix 2025 : "Une des courses les plus difficiles de ma carrière"... Pour Tadej Pogacar, une première frustrante mais électrique sur l'Enfer du Nord

Il est passé proche de vaincre l'Enfer du Nord dès sa première participation. Tadej Pogacar, victime d'une chute dans un virage à 38 kilomètres de l'arrivée, a dû laisser filer son rival Mathieu van der Poel vers une troisième victoire sur Paris-Roubaix, dimanche 13 avril. Le Néerlandais rentre un peu plus dans l'histoire, mais c'est bien vers le Slovène que tous les yeux étaient rivés le long des 55 kilomètres de pavés. Après des reconnaissances impressionnantes, le champion du monde se lançait dans le grand bain de l'Enfer du Nord. Voir un vainqueur sortant du Tour de France au départ de ce Monument n'était plus arrivé depuis Greg LeMond, en 1991. Un public sevré depuis trente-quatre ans de voir les dompteurs de cimes oser défier les pavés abrupts et massacreurs de Paris-Roubaix. . (.) 10min En casseur de codes habituel, Tadej Pogacar a rompu la monotonie pour glisser un nouveau caillou dans la socquette de Van der Poel. "Avec la forme que j'ai, si je n'essaye pas là, je ne le ferai jamais", anticipait-il après sa victoire sur le Tour des Flandres, il y a une semaine. "Avant d'annoncer sa participation, il est venu me demander ce que j'en pensais, racontait son coéquipier allemand Nils Politt dans la presse allemande. Je lui ai répondu : quand on gravit le Vieux Quaremont (mont emblématique du Tour des Flandres) aussi vite que toi, on peut gagner Roubaix. Il m'a dit : 'Très bien, je vais essayer alors'. Je pense qu'il a reniflé l'odeur du sang." Des secousses avant la chute Jamais là pour regarder les autres faire, il a lancé la première grande manœuvre à 95 kilomètres de l'arrivée, dans la trouée d'Aremberg, toujours inondée de Belges mais cette fois aussi de fans du zébulon slovène. "C'est la Reine des classiques. Étant fan de Pogacar, j'étais obligé de venir juste pour le voir. C'est le meilleur, c'est le GOAT, il n'y a personne qui est au-dessus de lui en ce moment", s'avançait Julien, maillot du champion du monde sur les épaules, qui s'était positionné dans la trouée pour ne pas le manquer. Son fan-club belge, les "Pogi Boys", le plus large au monde avec plus de 300 membres, s'était lui réparti par dizaines sur les secteurs pavés pour le soutenir. "Il va lâcher Van der Poel et arriver seul !", prophétisait à la mi-course son vice-président, Kris Mahieu. Le Slovène a électrisé la course, tentant de décramponner Mathieu van der Poel plusieurs fois, sans jamais y parvenir plus de quelques mètres. Alors que les deux rivaux s'approchaient de l'arrivée, Tadej Pogacar a manqué un virage à droite par précipitation. "J'ai essayé d'attaquer, de suivre les motos. Je n'ai pas vu le virage arriver si vite et il était trop tard pour freiner et je suis tombé. Ce sont des merdes qui arrivent (sic)", a-t-il retracé au micro de France 3. À moins de 40km de l'arrivée, Tadej Pogačar est parti seul à la faute sur les pavés du Paris-Roubaix. Passé près de l'imiter, Mathieu Van der Poel prend un ascendant décisif. 2min La moto garée l'a-t-elle induit en erreur ? "Je pense que ça a eu une influence sur ma chute. Quand on est à fond et qu'il y a une moto qui ne tourne pas, on peut penser qu'il n'y a pas de virage. Mais j'aurais dû le savoir, je ne veux pas que ce soit une excuse à ce niveau-là", a admis le Slovène. Van der Poel parti, un débours s'est creusé et Tadej Pogacar a dû se résigner. "J'étais toujours autour de quinze secondes et mes freins étaient en train de frotter à l'avant. Ça m'a perturbé donc j'ai commencé à ralentir. J'ai voulu changer encore de vélo, mais j'ai explosé. Je voulais juste voir la ligne d'arrivée le plus vite possible", poursuit Tadej Pogacar. Loin d'être rancunier, Tadej Pogačar, formidable deuxième de Paris-Roubaix, s'exprime à la suite de sa première expérience dans "l'enfer du Nord". Le triple vainqueur du Tour de France rend hommage à Mathieu Van der Poel, plus performant sur les pavés. 3min Aurait-il pu lâcher ou battre au sprint le double vainqueur sortant ? "Bien sûr on venait pour la victoire, mais à la fin Mathieu était juste plus fort. Ce n'est pas de chance, mais c'est Roubaix. Dans tous les cas, ça aurait été difficile de gagner, je suis content de la deuxième place", a reconnu le Slovène de 26 ans, qui n'a jamais battu au sprint le Néerlandais pour la victoire dans sa carrière. Si sa deuxième place peut lui offrir quelques regrets, le Slovène a quoi qu'il arrive réussi son pari. Il n'a pas chuté, a montré qu'il pouvait gagner Paris-Roubaix, et a exalté une course où il fut le seul à pouvoir contester la suprématie de Mathieu van der Poel. "Encore une fois, ces deux géants ont donné du grand spectacle", s'est félicité Mauro Gianetti, le manager du Slovène. "C'est un peu dommage qu'il ait commis cette erreur dans le virage. Sinon je pense que ça aurait été un sprint à deux parce que je pense ça aurait très dur de le lâcher", a estimé le vainqueur. "C'est un incroyable champion. Pour tout le monde, c'est presque normal qu'il vienne ici pour la première fois et qu'il finisse deuxième, c'est quand même exceptionnel." Mathieu van der Poel, vainqueur de Paris-Roubaix en zone mixte Tadej Pogacar, qui a tout de même profité de son tour et demi de stade, sort éreinté de sa découverte. "Ça a été une des courses les plus difficiles de ma carrière. Avec plus d'expérience, j'espère vivre les choses différemment dans le futur. Je suis quand même très heureux de cette deuxième place", a lancé le Slovène. Il n'a pas gagné, mais il poursuit encore Eddy Merckx dans sa chasse aux records : depuis le Belge en 1975, il est le premier vainqueur sortant du Tour de France à monter sur le podium de l'Enfer du Nord.